Malgré la multiplication des marathons et demi-marathons, malgré la hausse vertigineuse du nombre de coureurs, tout n'est pas rose dans le monde québécois de la course à pied.

La Fédération québécoise d'athlétisme (FQA), chargée de chapeauter le sport, estime que le boom de la course n'a pas favorisé le développement de l'athlétisme dans la province. Elle juge aussi que la multiplication des courses se fait de manière «anarchique».

La FQA a d'ailleurs demandé à Québec d'intervenir. La Fédération vient d'envoyer une lettre à trois ministères pour dénoncer l'attribution de subventions à une course non sanctionnée par elle, a appris La Presse. L'épreuve en question, le Marathon des deux rives, a eu lieu la fin de semaine dernière à Québec et a attiré 13 000 coureurs. «J'ai un problème quand un événement est subventionné alors qu'il est non sanctionné, que l'organisateur refuse systématiquement de reconnaître le rôle d'une fédération sportive», a lancé en entrevue le directeur général de la FQA, Laurent Godbout.

Le boom de la course au Québec n'est pas qu'un mythe. La Fédération estime qu'il y aura eu 375 événements de course à pied au Québec cette année - de la course de 1 km au marathon. Il y en avait moins de 200 il y a tout juste deux ans.

Les organisateurs sont encouragés à faire encadrer leur épreuve par la Fédération, mais n'y sont pas obligés. Une course sanctionnée doit par exemple être convenablement assurée et avoir un protocole d'urgence.

Les frais de sanction varient de 250 à 2500 $ - ce que paie le marathon de Montréal. Pour épargner quelques dollars, de nombreux organisateurs ne font pas sanctionner leur course. Le triathlon du Lac-Beauport, qui a eu lieu en juin dernier, n'était pas sanctionné par sa fédération. L'épreuve a fait la manchette, car une cycliste a été renversée par une voiture.

«C'est un milieu un peu anarchique où tout le monde s'improvise un peu organisateur, a dit M. Godbout. On veut s'assurer qu'un minimum de normes est respecté, que l'organisateur fait tout pour minimiser les risques. Ce que je déplore, c'est que des députés, des ministres appuient des événements qui ne sont pas sanctionnés.»

Mais même des courses sanctionnées par la Fédération pèchent par amateurisme. Le demi-marathon de Lachine a eu lieu la fin de semaine dernière sous le sceau de la FQA. Les organisateurs ont toutefois reconnu avoir commis une erreur de mesurage de... 450 mètres sur la distance de 21 km.

«Notre système n'est pas parfait, mais au moins, on va pouvoir proposer des pistes de solution à l'organisateur pour l'année prochaine», a indiqué M. Godbout.

Où sont les élites?

Le boom de la course n'a par ailleurs pas bénéficié à la formation des jeunes athlètes, déplore la Fédération. Oui, le nombre de coureurs de tous âges ne cesse d'augmenter. Mais cette croissance ne se manifeste pas auprès des très jeunes, qui pourraient un jour faire de la compétition de haut niveau. La question du développement de l'athlétisme dans la province n'est pas nouvelle et a refait surface à l'été 2012, quand le Québec a envoyé une maigre délégation aux Jeux de Londres.

Comme piste de solution, la Fédération rêve par exemple d'instaurer des frais de «licence». L'argent ainsi récolté pourrait servir en partie à subventionner l'athlétisme compétitif au Québec ainsi qu'à offrir des services aux coureurs sur route récréatifs. «Si on demandait à chaque coureur de payer pour une course une licence d'un jour d'un dollar, qui irait à la Fédération pour le développement du sport, je suis pas mal sûr que les gens approuveraient», croit le directeur de la FQA.

La direction du Marathon des deux rives ne nous a pas rappelé, hier.