Des hormones d'origine médicale déversées par les usines d'épuration provoquent des changements de sexe et une baisse de la fertilité chez les poissons en aval de Montréal, selon une nouvelle étude de l'Université de Montréal.

L'étude soulève un doute sur les impacts possibles de cette contamination sur la santé humaine, par l'eau potable ou la consommation de poisson, selon un spécialiste de l'Institut Armand-Frappier.

«Il y a un risque potentiel pour la santé, dit Daniel Cyr, biologiste et pharmacologue. On ne sait pas, c'est la grosse question. Certaines hormones devraient être enlevées par le charbon activé des usines de traitement, mais pour les autres, on ne sait pas.»

«Les hormones régulent les fonctions du corps, dit-il. Si une hormone est activée trop tôt ou trop tard, il y a des impacts sur le développement. On sait aussi que les hormones agissent sur les cancers de la prostate ou les cancers du sein.»

Il suffit d'un microgramme par litre d'eau - l'équivalent d'une pomme dans une piscine olympique - pour perturber le système hormonal des poissons. Dans son étude, Sébastien Sauvé, professeur de chimie à l'UdeM, a trouvé jusqu'à 90 microgrammes d'estrogènes par litre dans l'eau que rejette l'usine d'épuration de Montréal.

Le phénomène de changement de sexe des poissons exposés à la pollution hormonale n'est pas nouveau. Il a été observé pour la première fois en Angleterre dans les années 90. La pollution hormonale provient à la fois des médicaments (pilules contraceptives), d'hormones naturelles rejetées dans l'urine et de composés chimiques qui imitent l'effet des hormones.

La nouveauté dans l'étude de M. Sauvé: il a aussi mesuré la pollution provenant de l'hormonothérapie.

L'incertitude sur la santé humaine tient aux limites des instruments de mesure. «Pour évaluer les risques pour la santé humaine, il faut qu'on réussisse à détecter plus bas que 7 microgrammes par litre, dit M. Sauvé. Il n'y pas d'élément pour conclure qu'il y a un danger mais notre seuil de détection est encore trop élevé pour écarter tout doute.»

Daniel Cyr a démontré il y a quatre ans les effets de la pollution hormonale sur les rats. «On remarque que les jeunes ont des problèmes de reproduction à l'âge adulte, dit-il. Mais actuellement il n'y a pas de recherche là-dessus. Le financement pour ce type de recherche est difficile à obtenir.»