Tant de bouleversements ont eu lieu cette année… mais il en faudra plus pour enrayer les traditions culinaires des Fêtes des familles québécoises. Nous vous en présentons cinq qui ont dû faire face à des défis organisationnels, tout en conservant ou en adaptant leurs saveurs habituelles.

Même si Chantal Béliveau n’a pas du tout d’origines alsaciennes, cela ne l’a pas empêchée, avec sa famille, d’intégrer des traditions culinaires dignes du Bas-Rhin. Parmi les innombrables recettes de biscuits, gâteaux et autres délices confectionnés en fin d’année trône une tresse de Noël, cuisinée chaque année depuis 40 ans dans son foyer sherbrookois.

Si le temps des Fêtes évoque parfois du stress, Chantal Béliveau préfère le faire rimer avec tresse. Dès le 1er décembre, ses fourneaux sont chauffés à blanc pour produire toutes sortes de gâteries aux accents alsaciens. Le fer de lance de cette armée sucrée ? Une délicieuse brioche tirée d’un livre de recettes de Margo Oliver, datant des années 1970.

« C’est comme une brioche alsacienne, qui s’apparente au beerawecka, mais c’est une adaptation, précise Mme Béliveau. Dans cette recette, elle est faite avec des raisins de Corinthe, des zestes d’orange confits ou encore de la cardamome, qui est une épice très intéressante, car habituellement peu utilisée dans les recettes québécoises. »

Après 40 années de confections régulières, elle et son mari Richard se sont également essayés à toutes sortes d’ajustements ou d’expérimentations, pour lui conférer par exemple une tonalité plus locale, en remplaçant les fruits originaux par des bleuets et des canneberges, ou en faisant varier les agrumes.

« J’ai déjà fait une version végane sans œufs ni beurre, avec de l’huile et du lait de coco, ce qui n’a pas tant changé le goût, ni le rendu. On peut faire ce qu’on veut, comme mettre du miel au lieu du sucre », suggère-t-elle. La préparation se fait en plusieurs étapes de pétrissage et de montée de la pâte, sur une période de trois à six heures.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

La famille utilise une recette de Margo Oliver des années 1970, qui a fait ses preuves.

Coulis en coulisses

Il y a cependant un autre secret qui explique son grand succès dans la cellule familiale. Et ce n’est pas dans le gâteau lui-même qu’il faut le chercher, mais plutôt à côté, car les tranches de brioche prennent une autre dimension une fois nappées de coulis faits maison : là aussi, la variété est de mise, avec des valeurs sûres telles qu’une crème de citron frais ou une confiture de bleuets, obtenue avec des baies cueillies à la ferme Sévigny de Saint-François-Xavier-de-Brompton, dans les Cantons-de-l’Est.

Tout au long de décembre, la famille aime prendre une pause autour de la pâtisserie parfumée, grillée ou non, lors d’un déjeuner ou d’une collation en après-midi, accompagnée d’un café ou d’un chocolat chaud, en toute simplicité. Qui la rend victime de son succès, puisqu’elle est intégralement dévorée bien avant le réveillon.

Il faut en refaire, et on en refait souvent ! C’est vraiment une tradition.

Chantal Béliveau

Une tradition transmise avec succès, puisque ses enfants, aujourd’hui adultes et volant de leurs propres ailes, enfournent à leur tour leurs propres tresses chaque année. « Ceux qui sont mariés la refont, à part ma fille qui est médecin et n’a pas vraiment le temps pour le faire. Mes garçons la préparent eux-mêmes, ce ne sont pas leurs conjointes qui s’en occupent ! », précise-t-elle. La famille est d’ailleurs en train de consigner dans un livre les meilleures recettes de petits plats et délices circulant sur leurs tables.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Le secret est dans le coulis : avec une crème de citron maison, c’est tout simplement divin.

Car la tresse de Noël, bien qu’ancrée dans leurs habitudes depuis fort longtemps, n’est qu’une pointe de l’iceberg culinaire familial. Chaque année, des bredele, biscuits traditionnels alsaciens, sortent du four en rafale, composés avec une dizaine de recettes différentes, puis distribués à chacun des enfants la semaine avant le réveillon. Sans oublier la confection de nougat, de calissons, de pâte de fruits, de bûchettes, de plum-pudding, et on en passe !

Au fil des ans, le succès de la tresse ne se dément pas.

Ce n’est pas quelque chose de flashy, ce n’est rien d’extraordinaire, une simple brioche tressée d’une vingtaine de pouces de long.

Chantal Béliveau

Mais la simplicité dans une période habituellement agitée, voilà peut-être la meilleure recette à appliquer pour un temps des Fêtes sans stress.

Tresse de Noël de Margo Oliver

Ingrédients

1/3 de tasse d’eau tiède
2 c. à thé de sucre
2 enveloppes de levure sèche
1 tasse de lait
1/2 tasse de sucre
1/2 tasse de graisse végétale
1 1/2 c. à thé de sel
Approximativement 5 tasses de farine à tout usage
2 œufs
1/2 c. à thé de cardamome moulue
1 tasse de gros raisins de Corinthe
2 c. à table de zeste d’orange râpé
1 jaune d’œuf
1 c. à table de crème simple (15 %)
1/4 de tasse d’amandes tranchées

Préparation

Mesurer l’eau tiède et y ajouter 2 c. à thé de sucre ; brasser pour bien le dissoudre. Saupoudrer de la levure et laisser reposer 10 minutes. Bien brasser. Chauffer le lait au point d’ébullition. Retirer du feu et ajouter 1/2 tasse de sucre, la graisse végétale et le sel ; brasser jusqu’à ce que la graisse soit fondue. Verser dans un grand bol et laisser tiédir.

Ajouter environ la moitié de la farine et battre vivement, avec une cuillère de bois. Ajouter les œufs et bien battre. Ajouter la levure délayée, la cardamome, les raisins et le zeste d’orange, et bien mêler. Ajouter suffisamment de ce qui reste de farine pour que la pâte soit facile à manipuler. La mettre sur une planche enfarinée et la pétrir 5 minutes, ou jusqu’à ce qu’elle soit souple et élastique.

Mettre la pâte dans un bol graissé et la retourner une fois pour que le dessus de la pâte soit graissé. Couvrir d’une serviette humide et laisser lever, dans un endroit chaud, 2 heures ou jusqu’au double du volume. Abaisser la pâte, avec le poing, et la laisser lever de nouveau 30 minutes, ou jusqu’à obtenir presque le double du volume. Faire 2 parts de la pâte ; les couvrir d’une serviette humide et les laisser reposer 10 minutes.

Diviser l’une des parts de pâte en deux et l’autre, en trois. Prendre les 2 premières parts et les rouler sous les paumes, sur une planche enfarinée, pour en faire 2 cordons de 20 pouces de longueur. Les tordre ensemble, sans serrer, sur une grande plaque à biscuits graissée. Souder ensemble les extrémités des cordons et les replier un peu par en dessous. Aplatir légèrement le tout en appuyant avec la main.

Rouler, comme précédemment, les 3 parts qui restent en cordons de 20 pouces de longueur. Les tresser, en souder les extrémités et les replier en dessous. Étaler cette tresse sur la torsade déjà faite (cette dernière doit être plus large que la tresse), et presser légèrement pour bien souder les deux parties du pain.

Battre ensemble le jaune d’œuf et la crème, et badigeonner toute la pâte du mélange. Décorer de tranches d’amandes. Couvrir et laisser lever 1 heure, ou jusqu’au double du volume.

Chauffer le four à 350 °F. Cuire au four 45 minutes, ou jusqu’à ce que ce soit d’un beau doré foncé.

Recette tirée du livre Cuisine de choix, par Margo Oliver (Éditions Optimum, 1977)