On en voit peu dans nos plates-bandes. Plusieurs pigamons à floraison tardive méritent pourtant qu'on s'y attarde. Survol.

Fier et superbe, le pigamon de Rochebrune s'élève au-dessus de la masse des autres plantes. Son nuage dense de fleurs rose lavande émerveille.

D'origine japonaise, c'est l'un des plus beaux thalictrums. Contrairement à plusieurs autres membres de sa famille, dont notre espèce indigène, Thalictrum pubescens, qui fleurissent au printemps, ce pigamon donne son spectacle vers la fin juillet ou au début d'août. Son feuillage délicat très décoratif rappelle celui des ancolies. En raison de sa taille considérable, de 1,5 à 2 m, il trône à l'arrière de la plate-bande et se plaît dans une position mi-ombragée à ombragée. Rustique en zone 3, il a besoin d'un terreau retenant l'humidité.

Comme une foule d'autres plantes à floraison tardive, le thalictrum rochebrunianum est peu présent dans les jardins, justement parce qu'il n'est pas en fleurs au moment où la plupart des consommateurs font leurs achats, en mai.

Répandus un peu partout dans le monde, mais surtout dans l'hémisphère boréal, les pigamons comptent autour de 150 espèces. Plusieurs se distinguent par leur floraison sans pétales et sépales constituée uniquement d'étamines qui forment un ensemble vaporeux. Pour sa part, le pigamon de Rochebrune produit des fleurs complètes, un peu moins nombreuses, en forme d'étoiles au coeur jaune.

Parfois vendu sous le nom de Thalicthrum «Lavender Mist», son appellation scientifique de Rochebrune reste mystérieuse. Curieusement d'ailleurs, on utilise parfois la forme masculine de Rochebrun. S'il existe un village au nom Rochebrune en France et que le père du célèbre Voltaire serait aussi un Rochebrune, tout porte à croire que le nom rochebruniamum réfère à Alphonse Trémeau de Rochebrune (1836-1912). Médecin militaire français et botaniste, il a notamment publié un catalogue de plantes et un ouvrage sur la toxicité des plantes africaines.

Il existe aussi d'autres pigamons à floraison tardive et exceptionnelle. Le Thalictrum delavayi «Hewitts' Double» atteint lui aussi une hauteur considérable, plus de 1,5 m. Ses minuscules fleurs roses sont doubles, comme l'indique le nom du cultivar, ce qui leur donne un charme indéniable. Il pousse à la mi-ombre et est rustique en zone 4.

Enfin, le pigamon «Splendide» porte merveilleusement son nom. Créé par Thierry Delabroye, un hybrideur français qui nous a donné également plusieurs heuchères, ce cultivar produit des fleurs semblables au cousin Rochebrune, mais plus éparses et surtout sur une hampe très grande. Un de mes spécimens atteint actuellement 2,6 m, mais la plante peut dépasser 3 m. Les fleurs, qui semblent pendre dans les airs, flottent au vent donnant parfois l'impression d'un grand mobile silencieux. Splendide, il n'y a pas d'autre mot.

De l'infiniment grand, passons à l'infiniment petit, soit à Thalictrum kiusianum. Originaire du Japon lui aussi, il fleurit de la fin juillet à septembre. Son feuillage est rampant et ses fleurs rosâtres ne dépassent pas 10 ou 15 cm de hauteur. Mignon comme tout.

L'arrivée de Vanessa

Grande effervescence dans le jardin depuis plusieurs jours. Vanessa, la belle dame est omniprésente. Elle ne tient pas en place et se promène d'une plante à l'autre, s'attardant curieusement sur les plus hautes.

Vanessa cardui est un papillon souvent rare au Québec, mais cette année, on le voit partout. Chez moi, on en compte des dizaines dans les platebandes. Appelée la belle dame en français, ou encore Painted Lady en anglais, Vanessa cardui est un papillon répandu dans le monde entier, sauf en Antarctique et en Amérique du Sud. À l'exemple de notre monarque, c'est un migrateur qui peut effectuer de grandes distances, les populations d'Afrique du Nord voyageant jusqu'en Angleterre et en Irlande, souvent par centaines de milliers. On a même signalé sa présence au Groenland et en Islande.

Le papillon Vanessa cardui

Au Québec, il a été observé dans le Grand Nord, notamment à Kuujjuaq. La belle dame nous arrive des États-Unis au printemps et repart habituellement en septembre vers le Sud. Elle produit deux à trois générations par année en terre québécoise. Appelée aussi vanesse du chardon en Europe, elle est particulièrement attirée par cette plante. Dans mon jardin, elle affectionne surtout les grandes rudbeckies, les échinacées et les héliotropes parfumés. J'ai même eu la chance de voir la belle dame en compagnie d'un monarque dans mes eupatoires.

Cette visite vaut la peine d'être soulignée, car contrairement à ce que l'on croit, les espèces de papillons qui fréquentent nos jardins durant le jour ne sont pas très nombreuses, la plupart d'entre elles étant nocturnes.