L'utilisation du champignon Beauveria bassiana, qui tue les spécimens adultes d'agrile du frêne, est en voie d'homologation pour une utilisation à domicile. La société GDG Environnement, de Trois-Rivières, a entrepris d'ultimes tests en collaboration avec une dizaine de municipalités de la région de Montréal pour convaincre l'Agence canadienne de réglementation de la lutte antiparasitaire que le champignon est efficace et sécuritaire.

«Il faut être en mesure de répondre à un processus d'évaluation rigoureux qui vise à mesurer les impacts sur la santé humaine et animale, de même que les dangers pour les autres espèces d'insectes, a expliqué Réjean Bergevin, vice-président aux ventes de GDG Environnement. Normalement, il s'agit d'un processus qui peut prendre de deux à trois ans, mais la masse de données que l'on va avoir récoltée à la fin de l'année va être grande. On sait aussi que le champignon n'a pas d'impact contre les insectes pollinisateurs. En fait, les champignons réagissent la plupart du temps de façon très spécifique.»

Les municipalités d'abord

Une fois homologué, Beauveria bassiana serait vendu au grand public par des arboriculteurs spécialisés. Reste que selon M. Bergevin, ses clients risquent d'abord d'être les municipalités, car «les propriétaires particuliers ne sont généralement pas les plus sensibilisés, ils se contentent de procéder à l'abattage des frênes contaminés», dit-il.

Jusqu'à maintenant, les Villes de Beaconsfield, Pointe-Claire, Candiac et Contrecoeur ont entrepris de faire l'essai de pièges contenant le champignon sur leur territoire. D'autres municipalités vont s'ajouter dans les prochains jours et les prochaines semaines. Le programme le plus ambitieux se déroule à Contrecoeur, qui a fait installer une quinzaine de pièges au parc Cartier-Richard, où l'on trouve 180 frênes, soit la plus grande concentration sur le territoire de la ville située au nord-est de Montréal.

Une efficacité démontrée

L'efficacité du champignon a d'abord été démontrée au tournant de la décennie par Robert Lavallée, chercheur en gestion des ravageurs forestiers à Ressources naturelles Canada, aidé de son confrère Claude Guertin, professeur au Centre INRS-Institut Armand-Frappier. Le champignon est disposé au fond d'un piège constitué de plusieurs entonnoirs glissants qui permettent à l'agrile du frêne de s'échapper après avoir été contaminé par les spores entomopathogènes. L'insecte dissémine ensuite le champignon chez ses semblables lors des accouplements. 

«Le champignon tue l'agrile du frêne en cinq jours dans 95 % des cas, sinon ça prend au maximum deux jours de plus», précise Réjean Bergevin, vice-président aux ventes de GDG Environnement.

Cette stratégie permet donc de combattre la contamination à sa source, avant même que les frênes ne soient attaqués. Aussi, un seul piège permet de protéger plus d'un arbre.

Photo fournie par l'Agence d'inspection des aliments du Canada

Des spécimens d'agrile du frêne

Jusqu'à maintenant, les seuls traitements offerts consistent à tuer les larves de l'insecte en injectant un pesticide dans la sève de l'arbre. «Ces produits-là sont efficaces quand les arbres sont en santé», estime M. Bergevin. Sans compter qu'il faut répéter le traitement chaque année, sans relâche.

Couplée aux efforts de surveillance intensive entrepris par les municipalités dans le cadre de la Stratégie métropolitaine de lutte contre l'agrile du frêne, l'utilisation de Beauveria bassiana devrait permettre de ralentir considérablement l'ampleur de la contamination, même si cela n'enrayera pas la menace complètement.

Photo Alain Roberge, Archives La Presse

Une vue des dommages causés par l'agrile du frêne.