Un chantier naval allemand met la dernière main au Rainbow Warrior III, nouvel avatar du célèbre navire de Greenpace coulé par les services secrets français, un bateau ultrasophistiqué de 23 millions d'euros que l'ONG va mettre à l'eau lundi.

«Le Rainbow Warrior III est bien plus que le vaisseau amiral de Greenpeace. C'est un bateau très moderne et très écologique. C'est la mise en pratique de nos valeurs», a expliqué à l'AFP Mike Townsley, de Greenpeace International.

Encore en cale sèche dans un gigantesque hangar, à Berne-Motzen, sur la rivière Weser non loin de Brême (nord), le navire de 58 mètres de long et 680 tonnes arbore déjà sur sa coque verte les symboles du combat de l'organisation écologiste, une colombe et un arc-en-ciel - «rainbow» en anglais.

Mais à l'intérieur, tout n'est encore qu'un vaste chantier dans lequel s'affairent 120 employés de Fassmer, qui a remporté en 2009 l'appel d'offres face à des concurrents grec et portugais.

Structure familiale fondée en 1850, ce chantier naval qui emploie 900 salariés et est implanté aussi en Chine et aux États unis est spécialisé dans les bateaux sur mesure à forte composante technologique: patrouilles pour la police, navires antipollution pour le ministère de l'Environnement...

«Le chantier avait beaucoup d'expérience dans les solutions écologiques», note Patric Salize, l'un des porte-parole de Greenpeace Allemagne. Un savoir-faire très précieux pour mener à bout la construction du Rainbow Warrior III, le premier navire commandé par l'ONG alors que ses deux prédécesseurs étaient des chalutiers d'occasion.

«C'est un peu particulier de travailler pour Greenpeace», reconnaît Uwe Lampe, le designer en chef qui confesse avoir eu «quelques migraines» pour suivre l'impressionnante liste de spécifications imposées par l'ONG.

«Nous avons fait un bateau qui remplit un nombre inhabituellement élevé de normes environnementales, de sécurité, ou autre (...) Nous n'avions le droit d'utiliser que des pièces répondant aux normes européennes et d'acheter des matériaux produits en Europe, donc pas d'acier chinois ou de contreplaqué russe», précise M. Lampe.

Fonctionnant essentiellement grâce à d'immenses voiles fixées à deux mâts de 50 mètres de haut, le bateau disposera aussi d'une propulsion «hybride»: un moteur électrique lui permettant d'atteindre 10 noeuds (18 km/h) et un moteur diesel pour monter à 15 noeuds (28 km/h).

Station d'épuration d'eau, compacteur d'ordures, l'équipage, plafonné à 33 personnes, pourra vivre à bord en autonomie pendant quatre semaines.

Avec un héliport à l'arrière, le Rainbow Warrior III sera un petit bijou technologique intégrant des systèmes de communication extrêmement sophistiqués. «Dans les mâts, il y aura 48 antennes ou appareils de transmission», indique M. Lampe.

Autre demande spécifique de Greenpeace: la porte de la salle radio, juste sous le pont, doit pouvoir résister au moins trente minutes à un assaut de forces spéciales venues arraisonner le navire. Ce qui s'est déjà produit...

Pour financer les 23 millions d'euros de sa construction, soit 10 à 15% du budget annuel de l'ONG, Greenpeace invite les internautes sur un site dédié (https://anewwarrior.greenpeace.org) à subventionner tel ou tel composant du bateau: hublots, congélateur de cuisine et autres matelas...

Le nouveau Rainbow Warrior sera mis à l'eau lundi, tandis que les mâts seront montés le 9 juillet, 26 ans après que le plasticage du premier Rainbow Warrior par les services secrets français, qui avait tué un photographe de l'ONG au large d'Auckland (Nouvelle-Zélande).

Le bateau sera officiellement livré à Greenpeace mi-octobre, pour ses 40 ans.