Alors qu'une cinquantaine de pays ont commencé mercredi à Paris de délicates négociations sur les quotas de pêche au thon rouge, les Européens se sont entendus pour y plaider en faveur d'un quota stable ou légèrement réduit, selon des diplomates.

«Consciente de la situation précaire des stocks de thon rouge et de la nécessité d'une gestion durable» l'Union européenne (UE) a trouvé un compromis qui lui «assure une position ambitieuse et donne aux négociateurs assez de marge de manoeuvre pour prendre en compte les dynamiques sur place», a estimé la présidence belge de l'UE dans un communiqué.

Les 27 États européens, très divisés sur la question de la sauvegarde de ce poisson très lucratif mais trop longtemps surpêché, se sont mis d'accord pour négocier un quota situé «entre son niveau actuel de 13 500 tonnes et environ 11 500 tonnes», ont indiqué à l'AFP des sources diplomatiques.

En effet, sans citer de tonnes ni parler explicitement de «réduction» ou de «maintien» du quota actuel, le mandat de négociation adopté propose de suivre strictement l'avis des scientifiques pour parvenir d'ici 2022 à un niveau de rendement maximal durable pour les stocks de thon rouge, «avec une probabilité située entre 60% et 77%», selon un diplomate.

Les scientifiques estiment qu'un quota stable de 13 500 tonnes permet d'y parvenir avec une probabilité de 60%. Pour obtenir une probabilité plus forte, il faut réduire ce quota, selon les scientifiques.

«Une probabilité de 77% correspond à un quota autour de 11 500 tonnes», estime un autre diplomate européen.

Le mandat donné à la Commission européenne a été décidé contre l'avis de cette dernière, ce qu'a «profondément regretté» la présidence belge de l'UE.

«La Commission n'était pas en mesure d'accepter ceci, risquant de réduire au silence l'UE et elle-même, en tant que négociateur européen, quand la question de la gestion du thon rouge serait discutée» à Paris, a souligné la présidence belge.

La commissaire à la Pêche Maria Damanaki était engagée depuis plusieurs semaines dans un bras de fer avec les États concernés par la pêche au thon comme la France, l'Italie, l'Espagne et Malte, partisans d'un quota stable.

Mme Damanaki prônait une «réduction substantielle» du quota et avait avancé à titre d'exemple 6000 tonnes.

Pour contrer l'avis de la Commission, les 27 ont dû s'entendre à l'unanimité.

Mme Damanaki a reconnu mercredi soir que la décision des 27 n'était «pas fondée sur la proposition de la Commission».

«Néanmoins, la Commission va respecter ses obligations en tant que négociateur au nom de l'UE», a-t-elle précisé.

Le compromis négocié à Bruxelles autorise aussi «le renforcement des mesures de contrôle» de la pêche au thon, selon des diplomates, alors que les ONG ont récemment pointé du doigt des faiblesses dans le système en place.

La 17e réunion de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) s'est ouverte à huis clos mercredi à Paris.

Ses 48 membres ont dix jours pour trouver un compromis entre l'indispensable reconstitution des stocks de ce grand prédateur et migrateur marin et les intérêts des professionnels, armateurs et propriétaires de fermes d'engraissement, qui opèrent essentiellement en Méditerranée.