La Russie doit indemniser les Pays-Bas pour les dommages subis suite à l'arraisonnement en 2013 du navire de Greenpeace Arctic Sunrise, battant pavillon néerlandais, pour une action ciblant une plateforme pétrolière, a estimé lundi la Cour permanente d'Arbitrage.

«Le tribunal a conclu que les Pays-Bas ont droit à des dommages et intérêts en réparation des préjudices matériels subis par l'Arctic Sunrise et des préjudices matériels et immatériels subis par les 30 membres d'équipage de l'Arctic», a indiqué la CPA dans un communiqué.

L'indemnisation, dont le montant sera déterminé plus tard, inclut entre autres les coûts encourus pour réparer le navire et les montants des cautions versés pour la libération des membres d'équipage, a précisé la CPA, qui siège à La Haye.

Cette dernière a rendu public lundi un jugement rendu dix jours plus tôt, le 14 août.

«En arraisonnant, perquisitionnant, inspectant, arrêtant, saisissant et immobilisant l'Arctic Sunrise sans le consentement préalable des Pays-Bas, et en arrêtant, détenant et engageant une procédure judiciaire à l'encontre des 30 membres d'équipage, la Russie a manqué à ses obligations envers les Pays-Bas» en vertu de la Convention de l'ONU sur le droit de la Mer, a soutenu la CPA.

La procédure d'arbitrage a été initiée par les Pays-Bas. La Russie a pour sa part indiqué ne pas accepter l'arbitrage et ne pas vouloir y participer.

Le ministre néerlandais des Affaires étrangères Bert Koenders a salué le jugement de la CPA, soutenant que la décision «implique que l'arraisonnement du bateau était injuste et que l'arrestation de l'équipage était injuste».

«La liberté d'expression et le droit à manifester sont extrêmement importants pour les Pays-Bas», a ajouté le ministre.

Greenpeace a pour sa part réagi par la voix d'un de ses avocats, Daniel Simons : «les gouvernements existent pour faire respecter la loi et non pour agir tels des agents de sécurité armés opérant pour le compte de l'industrie pétrolière».

Les relations entre les Pays-Bas et la Russie ont été émaillées par plusieurs événements ces deux dernières années.

Parmi eux, l'arraisonnement de l'Arctic Sunrise, mais aussi le crash d'un Boeing 777 abattu en plein vol en juillet 2014 avec 298 personnes à bord, dont deux tiers de Néerlandais, alors qu'il survolait une zone tenue par des séparatistes pro-russes en Ukraine.

Bloqué près d'un an à Mourmansk 

Les 30 membres d'équipage de l'Arctic Sunrise, parmi lesquels 26 étrangers, avaient été arrêtés en septembre 2013 après une action ciblant une plateforme pétrolière du russe Gazprom dans la mer de Barents.

Accusés de piraterie puis de hooliganisme, ces activistes protestant contre l'exploitation des hydrocarbures dans la zone fragile de l'Arctique avaient finalement été libérés et graciés.

L'Arctic Sunrise est quant à lui resté bloqué près d'un an à Mourmansk avant de pouvoir rentrer aux Pays-Bas.

La plateforme visée par Greenpeace se trouvait dans la zone économique exclusive de la Russie, pas dans ses eaux territoriales.

«La protestation en mer constitue une utilisation de la mer à des fins internationalement licites liée à l'exercice de la liberté de navigation», a jugé la CPA.

Les Pays-Bas avaient en outre demandé à la CPA de juger que la Russie avait violé la Convention de l'ONU sur le droit de la Mer en ne respectant pas un jugement rendu par le Tribunal international du droit de la Mer.

Ce dernier avait notamment ordonné en novembre 2013 que la Russie libère le navire de Greenpeace. «La Russie ne s'est pas conformée à l'exigence de promptitude de l'ordonnance du TIDM», a estimé lundi la Cour d'Arbitrage.

Moscou n'avait pas participé non plus aux procédures devant le TIDM, affirmant ne pas reconnaître sa juridiction dans cette affaire.

Créée en 1899, la CPA est une organisation intergouvernementale ayant notamment pour fonction de faciliter le règlement de litiges entre États. La CPA compte 117 pays membres et ses jugements sont contraignants.