Se disant incapable d'obtenir de l'aide du gouvernement du Québec, Ristigouche Sud-Est se résigne à solliciter l'aide du public pour se défendre contre la pétrolière Gastem, qui lui réclame 1,5 million $ en dommages pour l'adoption, en 2013, d'un règlement visant à protéger l'eau potable.

Par le biais de sa campagne de financement, baptisée «Solidarité Ristigouche», cette municipalité située en Gaspésie espère amasser 125 000 $ afin de couvrir les frais juridiques engendrés par la poursuite.

Selon le maire, François Boulay, le montant réclamé par Gastem [[|ticker sym='T.GMR'|]] représente cinq fois et demie le budget annuel de 275 000 $ de la petite municipalité de 168 habitants.

«Nous avons déjà dépensé 80 000 $ depuis le début de la poursuite, mais nos réserves (financières) s'épuisent rapidement et nous ne serons pas en mesure de se rendre jusqu'au jugement, a-t-il expliqué, mardi, en entrevue. On doit se défendre.»

Gastem, qui a intenté sa poursuite en 2013, reproche à la petite municipalité d'avoir adopté un règlement qui a bloqué ses projets d'exploitation pétrolière. L'entreprise allègue qu'elle détenait des droits acquis relativement aux activités de forage avant l'entrée en vigueur de la mesure adoptée par Ristigouche Sud-Est.

«Avec l'adoption du Règlement, Gastem nous accuse de mauvaise foi et (d'avoir procédé à une) expropriation déguisée», affirme M. Boulay.

Le maire de la petite municipalité a indiqué s'être adressé au ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, mais sans succès.

«Nous devons vous mentionner que le Ministère ne peut s'immiscer dans un dossier faisant l'objet d'une procédure judiciaire», est-il écrit dans une lettre datée du 24 juillet dernier adressée à M. Boulay.Par voie de communiqué, le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, s'est défendu en affirmant qu'il n'avait pas «refusé» de rencontrer le maire de Ristigouche-Sud-Est. «Ce dernier (M. Boulay) a été informé dès le 25 juillet par un membre du cabinet (...) qu'une rencontre pourrait avoir lieu à la fin du mois d'août afin de discuter du dossier de la poursuite intentée contre la municipalité», indique-t-on.

Le cabinet de M. Moreau a répondu mardi que le ministre n'était pas disponible pour accorder des entrevues.

Adoption trop tardive

Même s'il salue le règlement sur la protection de l'eau potable (RPEP) dévoilé la semaine dernière par le gouvernement Couillard, le maire Boulay estime que son adoption arrive deux ans trop tard, et qu'elle ne change rien à la situation «très difficile» vécue par Ristigouche Sud-Est. «Si le règlement avait été adopté à l'époque où Gastem s'apprêtait à s'installer, l'entreprise n'aurait jamais eu la permission», déplore-t-il.

La mesure dévoilée par Québec prévoit que les entreprises du secteur du gaz et du pétrole devront respecter une distance minimale de 500 mètres pour effectuer du forage à proximité d'un site de prélèvement d'eau destinée à la consommation humaine.

Le maire de Ristigouche Sud-Est se réjouit néanmoins de voir que le règlement devrait protéger sa municipalité si Pétrolia (TSX:PEA), qui a mis la main sur les permis de Gastem, avait l'intention de poursuivre l'exploration, puisque le site en question se situe à un peu plus de 30 mètres de la rivière Kempt et à moins de 100 mètres d'un puits artésien.

«Ils ne pourront pas réutiliser le site de Gastem, ce qui est positif pour la suite des choses», a dit M. Boulay.

De son côté, le président et fondateur de Gastem, Raymond Savoie, a préféré ne pas commenter le dossier, affirmant seulement qu'il n'avait pas discuté avec les responsables de la municipalité depuis longtemps. «Je n'ai pas eu de discussions (avec M. Boulay) depuis l'hiver 2013», a-t-il simplement dit.

Le maire de Ristigouche Sud-Est bénéficie de l'appui de plusieurs élus locaux, dont le préfet de la MRC d'Avignon, Guy Gallant, le président de la Conférence régionale des élus de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Daniel Côté, et le préfet de la MRC de Bonaventure, Jean-Guy Poirier. Ce dernier a par ailleurs rappelé que plus de 70 municipalités québécoises avaient adopté des règlements similaires à celui de la petite municipalité gaspésienne.