Le règlement pour protéger l'eau lors des forages n'empêchera pas forcément l'exploration pétrolière à Anticosti, et c'est très bien ainsi, croit le ministre de l'Environnement, Yves-François Blanchet.

«C'est parce que ce n'était pas le but du règlement», explique-t-il en entrevue avec La Presse, pour faire le point sur la récente controverse.

Le gouvernement péquiste promet de commander une étude du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) pour le pétrole à Anticosti. Mais seulement avant l'exploitation.

On permettra donc l'exploration.

Ne faudrait-il pas vérifier qu'il n'y a pas de risque environnemental avant de passer à cette première étape? Le ministre Blanchet croit que ce serait illogique. «Avant de faire un BAPE, il faut aller chercher l'information qui servira de base à cette consultation. Pour cela, j'ai besoin de données. Et mes données, ce ne sont pas des pancartes. On ne peut pas s'en remettre à des études qui pourraient contenir des éléments pas tout à fait exacts, et dont l'intention est possiblement plus de militer contre le pétrole que d'améliorer les connaissances scientifiques.»

Et les forages exploratoires réalisés par les entreprises privées auront cette utilité, soutient-il. «On va coller des gens du ministère lors des forages», dit le ministre. Il ne croit pas qu'il aurait été préférable de permettre seulement les forages réalisés à des fins scientifiques. «On va faire un deux pour un», lance-t-il. Grâce aux entreprises, Québec connaîtra aussi le potentiel commercial du pétrole à Anticosti.

Règlement critiqué

Le géologue Marc Durand et Québec solidaire ont critiqué la distance limite de 400 mètres du règlement.

La roche visée par les pétrolières n'est pas à la même profondeur partout dans l'île, affirme M. Durand. En choisissant une norme de 400 mètres, presque tout le territoire d'Anticosti est ouvert aux forages.

Dans des présentations faites aux États-Unis, l'industrie insiste sur une distance de sécurité plus grande, d'environ 1000 mètres, entre l'étendue maximale des fracturations et la plus proche source d'eau potable, explique le géologue Durand. «On voit que le règlement a été conçu comme une commande de Pétrolia», a dénoncé M. Durand, en faisant référence à une des entreprises détenant des permis d'exploration dans l'île.

M. Blanchet répond qu'il ne vise pas à bloquer les forages. Il veut s'assurer qu'ils soient «sécuritaires». Et selon les études internes de son ministère, augmenter la limite de 400 à 1000 mètres «n'aurait pas davantage protégé les sources d'eau», rapporte-t-il.

Le règlement exigerait aussi une étude hydrogéologique pour chaque forage. Les conclusions pourraient mener à augmenter la distance ou la profondeur minimale qui sépare un cours d'eau d'un forage. Ou à l'interdire.

- Avec Charles Côté