Bien sûr, on se souviendra tous de la Première Guerre mondiale puisqu'on soulignait récemment son centième anniversaire avec fanfare. La Deuxième est aussi passablement connue. La troisième devait être tout aussi tonitruante quoiqu'un peu moins mondiale : il est ici question, vous l'aurez deviné, du match de cet après-midi au Centre Bell entre Connor McDavid et Jack Eichel.

Oui, oui, cette rivalité entre deux garçons de 17 ans qui enflamme le Canada. Les deux meilleurs espoirs du pays. L'un Canadien, l'autre Américain. Dans un scénario hollywoodien, l'un serait probablement mesquin et brutal et l'autre, plein de finesse et sentimental. Et surtout, ils se détesteraient.

Autant dire tout de suite que la troisième guerre mondiale n'aura pas lieu.

Hier, Connor McDavid et Jack Eichel se sont évertués à éteindre des feux. Les journalistes partis à la pêche sont rentrés bredouilles. Aucune déclaration de guerre. Aucune insulte. Tout au plus quelques paroles qui rappellent que le match d'aujourd'hui oppose le Canada et les États-Unis, pas les deux meilleurs espoirs du prochain repêchage.

« Connor, c'est un gars d'équipe. Il veut juste gagner. Je pense que c'est plus une affaire de médias et de fans, la rivalité McDavid-Eichel. Nous, on n'y pense pas », a lancé le toujours sympathique défenseur canadien Samuel Morin.

Rivalité préfabriquée?

Et si cette rivalité qui doit connaître son apogée à 16 h avec le début du match était préfabriquée ? Par la promotion, par certains médias peut-être. Après tout, à 17 ans, même Sidney Crosby n'avait pas survolé le Mondial junior. Il avait terminé au quatrième rang des marqueurs pour l'équipe canadienne.

C'est un peu ce qui se passe en ce moment avec nos deux vedettes de Hollywood. McDavid a amassé trois points en autant de matchs. Six joueurs canadiens en ont plus que lui et pourtant, le jeune surdoué a probablement autant de couverture médiatique que les six mis ensemble.

Jack Eichel, lui ? Placé sur le premier trio américain, il a marqué son premier but du tournoi à son troisième match. Rien pour étoffer un scénario de film.

L'entraîneur Benoît Groulx a rappelé hier que « l'équipe compte 22 joueurs ». Voilà qui est sage. En attendant, Groulx va tenter de relancer son deuxième trio. Nick Ritchie ira jouer sur la quatrième ligne, alors que Jake Virtanen, qui connaît un très bon tournoi, s'en va rejoindre Connor McDavid et Curtis Lazar. « Virtanen est pesant dans les batailles, a un beau lancer et une très belle accélération. Il peut apporter de la vitesse, une plus grande menace offensive à ce trio », croit l'entraîneur.

Comrie devant le filet

Le petit feu de paille McDavid-Eichel en cache un plus gros dans le camp canadien, où la situation des gardiens n'est toujours pas réglée. L'espoir du Canadien Zachary Fucale aurait été en droit de s'attendre, après un match très correct contre la Finlande, à enfiler les jambières contre les Américains. Il s'agit d'un des rendez-vous les plus importants du tournoi, qui se joue au Centre Bell devant ses futurs partisans. Benoît Groulx a plutôt décidé d'y aller avec Eric Comrie.

Depuis le début du tournoi, Équipe Canada junior (ÉCJ) alterne ses gardiens de but, comme si ses dirigeants attendaient une bévue pour enfin trancher.

« C'est une décision qui n'est jamais facile. On a deux gardiens très solides depuis le début. Hier, on pensait qu'Eric Comrie méritait de jouer aussi bien que Zach Fucale, explique Groulx. On pense que contre les États-Unis, les deux méritent de jouer aussi. On a décidé d'y aller avec Eric. Depuis le début, les deux jouent comme s'ils ne voulaient pas sortir du filet. »

Tout comme avec l'histoire de McDavid-Eichel, les principaux intéressés ont tenté d'éteindre les braises. « Zach et moi, on s'entend très bien, a assuré Comrie. J'étais content pour lui qu'il soit choisi contre la Finlande et il est content pour moi que je le sois pour le match contre les États-Unis. Au bout du compte, on veut gagner. Ça importe peu qui est devant le but. »

Objectif : le premier rang

Le match d'aujourd'hui n'est pas qu'une question de gardien ou de premier de classe. Il y a aussi un enjeu, puisque le vainqueur va prendre le premier rang du Groupe A.

Pour gagner, le Canada aura besoin de son premier trio - si efficace jusqu'à maintenant - peut-être beaucoup plus que d'un surdoué de 17 ans. C'est moins sexy, mais c'est vrai.

« Ce n'est pas McDavid contre Eichel demain. Ce sont les Canadiens contre les Américains, note Anthony Duclair. C'est sûr qu'il y a beaucoup de pression sur Connor, mais il est très mature pour un gars de 17 ans. Tout le monde a de la pression, toutes les quatre lignes, tous les 13 attaquants de l'équipe ont de la pression. On va devoir répondre présent. »

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Jack Eichel