Mario Fortin était l'homme le plus sollicité en ville hier midi. «Le téléphone ne dérougit pas», dit le directeur général du Cinéma Beaubien qui tient aussi les rênes du Cinéma du Parc.

C'est qu'à la suite de l'annonce de la fermeture de l'Excentris, producteurs et distributeurs se tournent vers lui et ses deux complexes de cinéma indépendant dans l'espoir d'y présenter leurs oeuvres. «Des distributeurs s'inquiètent, dit M. Fortin. Et comme premier commentaire, je vous dirais la même chose qu'il y a quelques années lorsque l'Excentris a fermé durant deux ans. Ce fut le pire moment que le Beaubien a vécu!»

Pourquoi? Parce que la pression du milieu devient alors énorme. Autant de films, moins de salles. Tout le monde essaie de tirer la couverture de son côté. Or, Mario Fortin, qui connaît son cinéma, sait que certains films ont besoin de temps pour trouver leur public.

«Avant, on parlait de bouche à oreille. Aujourd'hui, c'est davantage du pouce à l'écran. Ça permet souvent à un film de trouver son potentiel cinéphile.»

Mais dans un contexte où les lieux de diffusion diminuent, la compétition est forte.

Donc, les prochaines semaines seront intenses. Mais M. Fortin faisait déjà des pieds et des mains hier pour offrir des cases-écrans à des productions soudainement devenues orphelines. C'est ainsi que le documentaire Police Académie de Mélissa Beaudet prendra l'affiche, ce vendredi, au Beaubien. Tout comme Hôtel La Louisiane de Michel La Veaux; il sera au Beaubien, au lieu d'être à l'Excentris, le 18 décembre.

Prévu à l'Excentris, le documentaire Pipelines, pouvoir et démocratie d'Olivier D. Asselin sortira quant à lui le 4 décembre au cinéma Quartier latin.

La sortie des longs métrages Soleil de plomb et Fatima, prévue ce vendredi à l'Excentris, a été repoussée à janvier 2016.

La Cinémathèque à l'écoute

À la Cinémathèque québécoise du boulevard De Maisonneuve, on se dit également attristé par la nouvelle. Mais la nouvelle ne surprend pas le directeur général Marcel Jean, car le modèle financier de l'Excentris, qui s'appuie entre autres sur le pouvoir d'attraction de quelques grosses pointures du cinéma, était à son sens fragile.

«La situation nous amène à considérer le rôle que la Cinémathèque peut alors jouer dans l'écosystème cinématographique.»

«Les salles de l'Excentris ne seront pas remplacées demain matin et nous pouvons être une partie de la solution. Il y a deux salles à la CQ et notre programmation ne les remplit pas à pleine capacité. En plus, nous sommes en pleine réflexion sur la manière de programmer nos films. Donc, on est sans doute disponibles pour discuter, réfléchir, proposer et, éventuellement, faire partie de la solution pour le milieu.»

À l'heure actuelle, les deux salles de la CQ proposent 17 représentations par semaine. Au maximum de sa capacité, cela peut grimper à 70.

Il n'est pas question, avertit cependant Marcel Jean, que l'administration de la CQ danse sur les cendres de l'Excentris qu'il qualifie de «complexe de salles prestigieux». «Nos pensées vont vers le milieu cinématographique, et si on peut contribuer à l'aider, on va le faire», conclut-il.