Cocasse, métissée et rassembleuse, la comédie Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu? arrive enfin sur nos écrans. Entrevue avec le réalisateur de ce film qui fait courir les Français depuis plus de trois mois dans les salles de cinéma. Pour les soulager de la déprime politico-sociale.

En France, ce film arrive à point nommé.

Eurosceptique, démoralisée et en décroissance, la France d'aujourd'hui - qui vote Front national et tourne le dos à l'immigration -, avait besoin de fraîcheur et d'humour. La comédie Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu?, sortie le printemps dernier, nous montre un autre visage de la France. Un peuple métissé qui rit de bon de coeur, balayant tous ses problèmes dans un feu commun de joie et d'éclats de rire.

De passage à Montréal, en mai dernier, Philippe de Chauveron savourait l'immense succès de son film. Lors de sa rencontre avec La Presse, en pleine fièvre des séries éliminatoires de hockey, le réalisateur portait fièrement un chandail du CH en se demandant si les Québécois partageraient l'enthousiasme de leurs «cousins».

Soyez rassuré. La peur de l'autre, les préjugés et le rejet des différences sont, hélas, universels. Le rire contagieux du film pourrait bien se propager aussi à travers le Québec.

Est-il surpris par son succès populaire (près de 11 millions d'entrées) et critique? «On avait bon espoir que ça plaise au public, mais jamais à ce point-là. C'est extraordinaire!», se réjouit le réalisateur français. Le film a aussi fait un carton en Belgique, en Suisse et il y a un projet de remake américain dans l'air.

Famille métissée serré!

Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu? est une comédie sur le mariage mixte et la diversité culturelle. Monsieur et madame Verneuil (Christian Clavier et Chantal Lauby) forment un couple bourgeois de province, très catholique et vieille France qui a quatre filles très BCBG. Tour à tour, celles-ci se marient avec des hommes d'origines et de religions différentes: un juif, un musulman, un Chinois et un Noir. Les gendres et leurs beaux-parents devront s'accepter et s'aimer, malgré leurs différences et les poncifs xénophobes, afin de former une famille unie. Non sans heurts et... bons moments comiques!

«La France n'est pas plus raciste que les autres nations, mais c'est un pays schizophrène, estime le réalisateur. Les Français votent Front national (à 26 % aux récentes élections européennes), mais détiennent le record des mariages mixtes en Europe!»

Le cinéaste se base sur des études qui indiquent qu'environ 20 % des unions françaises se feraient entre des individus d'origines ou de confessions différentes. Contre 3 % en moyenne en Europe! «Dans le top 20 des personnalités préférées des Français, on retrouve des artistes comme Jamel Debbouze, Gad Elmaleh, Omar Sy...», ajoute le réalisateur, peaufinant sa thèse sur la schizophrénie culturelle de ses compatriotes.

La vérité comique

Avec le débat entourant le «mariage pour tous» en France, le réalisateur et scénariste a-t-il songé à faire convoler en justes noces l'une des filles Verneuil avec une autre femme? «On y a pensé, bien sûr. Mais on s'est dit que le mariage gai représente un autre sujet. De plus, on ne parlait que de ça en France durant le tournage; avec toutes ces manifs dans les rues de Paris... On ne voulait pas relancer le débat.»

Par-delà le thème du métissage, le réalisateur souligne l'importance de la vérité en comédie. «Si un élément ou une situation n'est pas crédible, le spectateur risque de décrocher. Alors, il faut grossir le trait, mais pas trop.»

Philippe de Chauveron avait déjà pensé au couple Clavier et Lauby (deux superstars en France) avant l'écriture du scénario. «Pour les gendres, le "casting" a été plus long et compliqué, dit-il. Je cherchais les gendres idéaux: beaux, séduisants, sympathiques, avec de bons métiers. Je voulais démontrer qu'il n'y n'avait aucune raison de ne pas les accepter dans une famille.»

Le réalisateur a porté son choix sur quatre jeunes acteurs qu'il a vus au théâtre ou au cinéma. Medi Sadoun (vedette du film Les Kaïra) pour incarner le gendre arabomusulman; Ary Abitan, pour le juif séfarade; Fred Chau (Jamel Comedy Club) pour le Chinois; puis, pour l'Africain, Noom Diawara (un acteur d'origine malienne, coauteur de la pièce Amour sur place ou à emporter). À la fin du film, ce personnage fait venir sa famille de Côte d'Ivoire pour son mariage avec la jolie cadette. Ce qui provoque des situations et des dialogues hilarants.

Si Philippe de Chauveron s'enorgueillit que son film agisse comme un baume sur les plaies sociales, il précise une chose: «J'ai écrit et dirigé une comédie; pas un essai sur le racisme en France. Je ne suis pas là pour prôner le métissage à tout prix. À la base, ce sont des mariages d'amour. Tant mieux si l'élément multiculturel ajoute à la richesse de leur amour!», conclut le réalisateur.

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Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu? prend l'affiche le 1er août.