Les intentions sont nobles. C’est indéniable. Et les histoires évoquées dans Dérapages sont d’une tristesse infinie. Paul Arcand s’est donné la mission de tenter de conscientiser les masses au phénomène de la vitesse au volant chez les jeunes, en reprenant là où tous les messages de sensibilisation échouent depuis 10 ans.



À cet égard, Dérapages relève bien davantage du reportage-choc que d’une véritable approche documentaire. Au-delà des témoignages – certes bouleversants – recueillis auprès de gens dont la vie a basculé à cause d’un accident de la route, on cherche en vain de vraies pistes de réflexion, ou même une perspective plus large. Arcand pose un constat, sans creuser véritablement son sujet ni remettre en question un contexte social favorisant ces envies irrationnelles d’échapper aux règles établies.

Pour faire passer le message, le réalisateur multiplie les effets. Le montage est serré, et les scènes de course sont filmées à la Fast & Furious par une caméra nerveuse au son d’une trame musicale endiablée. Ces effets, cool aux yeux des jeunes, ont pour but de contraster avec les drames épouvantables vécus par les gens dont Arcand recueille les témoignages.

Fidèle à sa nature, le cinéaste s’appuie sur une narration au ton neutre. En revanche, sa mise en scène se fait parfois insistante, particulièrement dans la recherche de l’émotion. Les témoignages sont assez éloquents en eux-mêmes, il n’était pas nécessaire d’en rajouter.

À l’arrivée, on ne peut que remettre en cause la pertinence d’utiliser le circuit des salles de cinéma pour lancer une discussion de cette nature. Un tel document ne trouvera peut-être pas l’écho souhaité de cette façon.

À la lumière du constat que fait le réalisateur, Dérapages glacera le sang des spectateurs adultes, particulièrement s’ils sont des parents d’adolescents. Mais ceux à qui Dérapages s’adresse plus directement, c’est-à-dire les jeunes conducteurs ivres de vitesse et de sensations fortes, resteront probablement loin de la soixantaine d’écrans où ce reportage est à l’affiche. Et c’est bien là le problème.

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DÉRAPAGES. Documentaire réalisé par Paul Arcand. Avec Frédéric Bélanger, Sébastien Richer, Nathan Richer. 1h34.