Fermetures d'usines, recul des ventes, mises en faillite. Partout, la même rengaine, la même inquiétude. L'auto va mal et ses dirigeants ne s'en cachent pas, ne s'en cachent plus. Mais toute règle a son exception et celle-ci se trouve en Chine, aujourd'hui premier marché automobile mondial avec 9,38 millions de véhicules vendus. La crise? Quelle crise?

La crise économique se serait-elle arrêtée aux portes du Salon automobile de Shanghai? Enfin presque, puisque la Chine, habituée à des ventes en hausse de plus de 20% par an, a enregistré en 2008 sa première croissance à un seul chiffre (6,7%) depuis 10 ans. Les acteurs de l'industrie de l'automobile ne s'en formalisent pas outre mesure.

 

Pour bien comprendre pourquoi, sachez que le mois dernier il s'est vendu plus de 1,1 million de véhicules neufs en Chine, c'est-à-dire pratiquement le même nombre qu'au Canada, mais sur une base annuelle... À elle seule, cette statistique laisse deviner tout le potentiel du marché chinois.

En alternance une année sur deux, avec son homologue de Pékin, le Salon de Shanghai a mis les petits plats dans les grands. Le nombre d'exposants a à ce point augmenté que l'exposition occupe aujourd'hui les 11 bâtiments du centre des congrès et une grande partie du stationnement extérieur pour inclure les équipementiers.

«Shanghai n'est pas la Chine», vous diront les Chinois, mais l'automobile s'y porte très bien merci. C'est du moins la première impression ressentie au terme de la journée réservée aux professionnels des médias. En fait, contrairement à Los Angeles, Detroit ou Genève, l'atmosphère y est électrique et les discours fleuris. Les constructeurs mondiaux profitent de chaque tribune pour rappeler l'importance de ce marché. Pour Audi, par exemple, la Chine est devenue le deuxième plus grand débouché après l'Allemagne. Pour Porsche, le troisième et pour Buick, le premier...

Changement de décor dans les pavillons réservés aux constructeurs étrangers. Spectacles de présentation à grand renfort de musique tonitruante, de danseurs, de fumée et de projecteurs multicolores, le salon «à l'américaine» sert manifestement de référence. En revanche, les mannequins chargés de mettre suavement en valeur tel ou tel modèle font davantage penser au Salon de Tokyo qu'aux salons européens (Francfort, Birmingham), dans la mesure où il est difficile, voire impossible, de prendre une photo de la voiture sans son mannequin attitré.

Si les voitures exposées font rêver les Chinois, le marché chinois, lui, fait saliver les constructeurs. De nombreux constructeurs locaux étaient également présents, qu'ils soient partenaires avec des constructeurs étrangers, comme SAIC (GM, Volkswagen...), Dongfeng (Peugeot/Citroën, Renault/Nissan, FAW (Volkswagen, Mazda...) ou Brilliance (BMW) ou qu'ils soient totalement indépendants, comme Chery, BYD, Chengfeng Motor ou encore Jinghuai Automobile. Chez BYD par exemple, nous pouvions contempler une S8, copie presque identique de la Mercedes SL alors que chez Geely se trouvait la GE, une Rolls-Royce Phantom à peine modifiée.

Tous ces constructeurs locaux imitent encore la carrosserie de modèles existants ou s'inspirent sans vergogne des sigles célèbres existants (Bentley, Toyota). C'est à se demander si, au fond d'eux-mêmes, les Chinois ne sont pas convaincus de faire presque un honneur aux constructeurs occidentaux en les copiant aussi ouvertement. Chez BYD, par exemple, on exposait une S8 qui ressemblait étrangement à une Mercedes SL. «Elle ressemble à la SL, admet un porte-parole du groupe. En tout cas, c'est ce que disent les gens, mais ce n'est pas notre avis.

 

Regardez-la de profil! Vous trouvez toujours qu'elle est identique à la SL?» Effectivement, il y a des différences. Légères. La barrette métallique, plus grosse, a été déplacée vers l'arrière et la «copie» chinoise compte quatre places, alors que l'original n'en a que deux. D'accord, mais le reste? «C'est le hasard!» ajoute le porte-parole. Même chose pour la F3R de BYD, une Corolla chinoise? «Oui, nous devons avoir eu la même idée», de conclure notre interlocuteur agacé.

Pendant ce temps, au kiosque Chevrolet, un individu mitraille chaque centimètre carré de la Camaro exposée, depuis le capot jusqu'au bas des portières, puis s'accroupit pour prendre des clichés détaillés de l'arrière du véhicule... Pour qui travaille-t-il? Réponse l'an prochain?

 

Photomontage Monvolant

Tous ces constructeurs locaux imitent la carrosserie de modèles existants ou s'inspirent sans vergogne des sigles célèbres existants. Ici la Geely GE (en haut) et la Rolls Royce Phantom.