Par les temps qui courent, dominer le marché des «4x4 doux» est l'objectif des constructeurs. Il faut dire que le créneau est fort rentable: 8,8% d'augmentation des ventes au cours des six premiers mois de l'année au Canada par rapport à l'année précédente.

C'est beaucoup? Et comment! Avec plus de 132 000 unités vendues au cours de cette période, ce marché est le troisième en importance au pays, tout juste derrière celui des berlines intermédiaires (135 120 unités) et celui des compactes (277 321 unités); considérant son importance, il n'est pas étonnant que pratiquement tous les constructeurs y aient inscrit un véhicule.

Assez polyvalents pour la ville, la route et les vacances, ces véhicules à la garde au sol surélevée acceptent aussi de nous conduire sur des routes en gravier ou en terre; ils craignent cependant, pour la plupart, de s'enliser hors des sentiers balisés. Mais est-ce réellement leur raison d'être? Pas du tout. En revanche, pour ceux et celles qui doivent transporter des objets volumineux ou se rendre à un chalet éloigné, il est tentant d'acheter un utilitaire plutôt qu'une berline.

Les utilitaires compacts essayés durant ce comparatif n'ont rien de rustique. Ils ne supportent ni les bottes boueuses ni les poils de chien sur les banquettes. En fait, ces véhicules se comportent comme des autos et profitent, comme elles, de toutes ces petites attentions qui rendent les balades agréables: sellerie de cuir, baquets chauffants, chaîne stéréo, etc. Cela n'a rien d'étonnant dans la mesure où toutes nos candidates dérivent d'une berline.

Nous n'avons donc pas cherché à évaluer la capacité de ces véhicules à grimper aux arbres. Notre objectif était plutôt de mesurer leurs performances dans des conditions normales, c'est-à-dire un mélange de route, de ville et de campagne.

Vie à bord

Après six mois cette année, le CR-V et le RAV4 luttaient toujours pour le deuxième rang dans la catégorie derrière l'Escape: le 30 juin dernier, la différence entre les deux était de seulement sept unités vendues. Et la concurrence s'organise! Les Rogue, Outlander et Forester menacent.

Mais la formidable machine de guerre mise au point par Honda et Toyota n'est pas à la veille d'être vaincue. Profitant d'un réseau de concessionnaires établi et de solides assises financières (flexibilité et taux de financement), Honda et Toyota ne sont actuellement inquiétés sur le plan commercial que par Nissan et par Jeep, dont le Patriot se vend très bien. Mitsubishi et Subaru progressent eux aussi, mais la route s'annonce encore longue. Toutefois, même s'il est peu probable qu'ils se mesureront bientôt aux poids lourds dans l'arène commerciale, les Outlander et Forester pourraient très bien causer la surprise de ce match en raison de leurs qualités intrinsèques. Voyons donc voir qui grimpera sur la plus haute marche de notre podium.

Physiquement, le Forester est celui qui se démarque le plus. Il est plus étroit, plus court et plus bas que les quatre autres. Sachez que le CR-V et l'Outlander sont les plus larges, tandis que le RAV4 est le plus haut et le Rogue le plus long.

Avec un volume intérieur de plus de 3000 litres, le RAV4 passe pour le plus spacieux du groupe. Attention, les chiffres ne disent pas toujours tout. Ainsi, le Mitsubishi offre le meilleur dégagement à l'arrière pour les jambes tandis que le CR-V présente le plus d'espace aux hanches et le Forester est le plus invitant pour la tête. En revanche, selon nos essayeurs, le Toyota s'est avéré le plus confortable. En effet, sa banquette est généreusement rembourrée, et ses larges portières permettent de s'engouffrer dans l'habitacle et de s'en extraire avec facilité. À cet avantage, il convient d'ajouter sa modularité accrue. En effet, il est possible de fractionner en trois le dossier de sa banquette, comme sur le CR-V. C'est pratique et cela facilite grandement le transport d'objets longs (des skis par exemple) sans compromettre le confort des deux passagers à l'arrière.

Côté volume du coffre, le RAV4 se révèle, de peu, le plus «déménageur» du groupe, surtout lorsque sa banquette arrière est complètement rabattue. Mais aussi vaste soit-il, le coffre du Toyota est peu pratique. Son ouverture latérale s'ouvre hélas du mauvais côté de la rue. À ce chapitre, les essayeurs ont préféré l'Outlander et son battant inférieur sur lequel il est possible de s'asseoir ou de déposer un objet lourd (c'est idéal pour reprendre son souffle). En dépit de ses dimensions extérieures compactes, le Forester en a étonné plus d'un. Le volume de son coffre est largement supérieur à celui du Rogue.

Après examen, la présentation intérieure du Forester s'est avérée la meilleure, question qualité d'assemblage. À défaut de se montrer aussi exemplaire dans ce domaine, les autres priorisent la luminosité de l'habitacle, qui distille un sentiment d'espace et d'aisance, tout le contraire du Forester, où l'on se sent plus à l'étroit.

Au chapitre des espaces de rangement, le RAV4 l'emporte - il dispose de deux coffres à gants. Le Honda aurait pu faire beaucoup mieux. Comme son prédécesseur, il permet d'accéder aux places arrière en usant d'une tablette rétractable qui, à l'usage (et à l'usure), est plus contraignante qu'utile. Le Forester aussi, qui tapisse son habitacle (et son coffre) de plusieurs rangements. On attendait plus d'ingéniosité de la part des concepteurs du Outlander et, surtout du Rogue.

Sur la route

Nos cinq protagonistes sont issus d'une architecture automobile. Pas de surprises donc. À l'exception du Forester, leur structure entièrement monocoque est associée à un rouage intégral temporaire - qui passe de la traction avant à la traction intégrale selon les conditions d'adhérence et ce, en continu. Mentionnons également que le Toyota et le Subaru sont les seuls du groupe à offrir d'entrée de jeu un rouage à quatre roues motrices. Le CR-V, l'Outlander et le Rogue proposent des versions à roues avant motrices seulement.

Soulevons le capot maintenant. Chez Toyota, on retrouve un quatre cylindres de 2,4 litres et 166 chevaux. Souple et discret, ce moteur s'est avéré le plus frugal du groupe avec une consommation moyenne de 10,6 L/100 km; et son réservoir de 60 litres lui assure une bonne autonomie. Le numéro un japonais aurait sans doute pu faire mieux encore en ajoutant un rapport à la boîte automatique. Idem pour le Forester, qui retient les services d'un moteur à plat aux performances plutôt ternes par rapport aux autres.

D'une cylindrée identique à celui du Subaru, le moteur du Nissan, aidé par une boîte à variation continue (CVT) fort bien adaptée, s'est révélé le plus vif de nos essais chronométrés tant en accélérations qu'en reprises. Le plus économique aussi, puisqu'il est le seul à être parvenu à descendre sous la barre des 10 L/100 km lors de ce comparatif. Le mieux et maintenant le pire: l'Outlander. Sa boîte CVT est sans doute la grande responsable de cette contre-performance en raison d'une gestion électronique trop lente. Quant au moteur Honda, il est d'une très grande souplesse et entretient des rapports parfaitement huilés avec la boîte automatique à cinq rapports.

Réputé pour ses qualités dynamiques, le RAV4 voit ici le Rogue le dépasser sur la route. De l'avis de nos essayeurs, le Nissan procure plus d'agrément encore que le RAV4, ce qui n'est pas peu dire. La direction du Nissan transmet avec acuité les imperfections de la route, alors que les suspensions veillent à minimiser les mouvements de caisse.

Le comportement des trois autres demeure tout de même très rassurant en toutes circonstances. Pour plus de confort, il faut se tourner du côté de l'Outlander ou mieux encore du Forester. Ce dernier se révèle en outre le plus facile à garer dans les espaces restreints, grâce à son rayon de braquage très court.

Au chapitre de la sécurité (active et passive), le CR-V fait légèrement mieux que ses concurrents mais, question freinage, il doit s'incliner face au Forester.

Budget

En toute franchise, la déception de ce match est venue de Honda. Malgré d'indéniables progrès au chapitre de l'insonorisation, du confort et de la tenue de route, cette génération du CR-V se démarque trop peu de l'ancienne. De plus, Honda tarde toujours à réajuster ses prix pour mieux refléter l'appréciation de notre dollar, et l'arrogance de certains concessionnaires dépite plusieurs consommateurs, si l'on en juge par le courrier reçu.

L'Outlander termine au quatrième rang, même si sa consommation est la plus importante du groupe. Sa position, Mitsubishi la doit à sa grille tarifaire plus avantageuse, sa garantie généreuse et son équipement somme toute très complet. Mais est-ce suffisant? Non.

Même si plusieurs de nos essayeurs doutaient de sa compétitivité au début de ce match, le Forester a causé une certaine surprise. Sa capacité de remorquage est de loin supérieure à celle des autres, tout comme l'efficacité de son rouage intégral. Dans tous les autres domaines, le Forester n'excelle en rien, mais parvient tout de même à se distinguer par son homogénéité.

Le Rogue aussi est passé bien près de causer la surprise. Sa faible consommation et ses qualités dynamiques ne parviennent cependant pas à occulter la petitesse de son coffre et sa faible capacité de remorquage. Bref, c'est sur le plan pratique que le Nissan perd la première place au profit du RAV4, devenu encore plus compétitif depuis la révision à la baisse de ses prix.