À l'heure même où son chef Yannick Nézet-Séguin montait au pupitre du Chamber Orchestra of Europe, au Mostly Mozart Festival de New York, l'Orchestre Métropolitain, demeuré sagement à la maison, clôturait la 48e saison des Concerts populaires de Montréal, au Centre Pierre-Charbonneau.

À titre d'«orchestre officiel» de la série, l'OM a donné trois des six concerts de l'été 2012, dont deux avec des chefs invités. Le chef invité pour le dernier concert était Aïrat Ichmouratov, ce Russe de 39 ans qui, fixé au Canada depuis une quinzaine d'années, s'est d'abord fait connaître comme clarinettiste, fort brillant du reste, au sein de l'ensemble Kleztory, multipliant ensuite des activités de chef d'orchestre et de compositeur. En fait, l'homme est devenu assez présent dans notre petit monde pour qu'on n'ait plus à vérifier chaque fois l'orthographe de son nom!

Le nouveau venu a aussi appris un bon nombre de mots français, comme on l'a constaté au micro, l'un de ces mots étant «exceptionnel». Il l'a répété je ne sais plus combien de fois, et à tout propos. Selon lui, tout, absolument tout, à ce concert, était «exceptionnel». Il a cependant eu la décence de ne pas l'employer pour désigner sa composition, cette ouverture Ville cosmopolite, op. 29, dédiée à la Ville de Montréal, qui, justement, ouvrait la soirée.

La chose dure 12 minutes. C'est au moins deux fois trop. Il n'y a là rien qui évoque la diversité ethnique de cette ville, sauf l'espèce de gigue campagnarde qui, à la toute fin, vient égayer ce ramassis de formules propres à la musique de film. Comme Hitchcock, mais sans doute involontairement, l'auteur «signe» le tout d'un petit solo de clarinette.

Comme chef d'orchestre, il a eu plus de succès. Il est vrai que les pièces qu'il avait entre les mains sont de celles qu'on écoute toujours avec plaisir et que l'Orchestre Métropolitain est une formation professionnelle qui les a bien dans les doigts: les deux extraits choisis de Peer Gynt de Grieg, la fracassante Une Nuit sur le Mont Chauve de Moussorgsky et cette descriptive Moldau de Smetana qui, en fait, s'intitule Vltava. Tout cela s'est bien déroulé. Le chef a même ajouté un rappel, sans l'identifier. Il s'agissait du finale de L'Oiseau de feu de Stravinsky.

Avant tout, le concert nous valut la révélation de deux très jeunes instrumentistes, retenues parmi les lauréats du dernier Concours de musique du Canada. La violoniste Isabella Perron, 12 ans, a joué le premier mouvement du troisième Concerto de Saint-Saëns avec une dramatique corde de sol, un pur lyrisme et une étonnante justesse, maintenue intacte jusqu'au suraigu. On a bien lu 12 ans. Que nous réserve donc la petite dans 10 ans ?... Marlène Ngalissamy, 19 ans, née en Russie, a traversé l'unique Concerto pour basson de Mozart avec, elle aussi, l'assurance et la précision d'une professionnelle. Le grave du basson a quelque chose d'un peu comique, ce que la jeune soliste fit ressortir avec la plus charmante candeur, notamment dans les deux cadences.

Avant le concert, quelqu'un est venu au micro nous avertir - au cas où nous n'allions pas le remarquer - que la violoniste jouerait la partie de violon du Concerto de Saint-Saëns et que la bassoniste jouerait la partie de basson du Concerto de Mozart. Le même intervenant a aussi remercié les commanditaires de leur «support».

***

ORCHESTRE MÉTROPOLITAIN. Chef invité : Aïrat Ichmouratov. Solistes : Isabella Perron, violoniste, et Marlène Ngalissamy, bassoniste. Jeudi soir, Centre Pierre-Charbonneau. Concerts populaires de Montréal.