C'est la troisième fois au moins que j'entends Matthieu Latreille et mon impression n'a pas changé: à 29 ans maintenant, voici, à n'en pas douter, l'un de nos organistes dignes d'attention.

Pierre Grandmaison, responsable de la série dominicale d'été à l'orgue de la Basilique Notre-Dame, où il est titulaire, et qui est aussi le professeur de M. Latreille, avait confié à son élève l'un des huit programmes de la saison 2012, centrée sur Widor et son disciple Vierne à l'occasion du 75e anniversaire de leur disparition.

M. Latreille avait fait un choix original: de chaque compositeur, la troisième Symphonie. Bien que les deux oeuvres s'inscrivent dans la tradition de l'orgue symphonique français, 40 ans les séparent et, forcément, des esthétiques différentes. L'écriture de Widor est conventionnelle par rapport à celle, plus moderne, de Vierne. En fait, des 10 Symphonies de Widor, la troisième est l'une des moins intéressantes, alors que, des six Symphonies de Vierne, la troisième est considérée comme son chef-d'oeuvre.

En conséquence, une registration plus originale, plus éclatante et plus fournie eût donné quelque dimension au Widor. Joué sur un ensemble de jeux très discrets, seul le quatrième mouvement, Adagio, bénéficia d'une certaine recherche de timbres.

Le Vierne passa mieux. Au départ, l'oeuvre se suffit à elle-même par les idées qui l'illuminent. Authentique musicien et grand technicien, M. Latreille redonna à l'oeuvre sa pleine envergure musicale, avec, dans la subtilité ou la puissance, la registration qui s'imposait. L'organiste avait d'ailleurs préparé le Vierne de longue main, ayant offert trois des cinq mouvements à son récital de l'an dernier.

__________________________________________________________________________

MATTHIEU LATREILLE, organiste. Dimanche soir, Basilique Notre-Dame. Orgue à traction électropneumatique Casavant (1890-1991); 92 jeux, quatre claviers manuels et pédale.