Le retour espéré devient enfin réalité. Nous reverrons Charles Dutoit au podium, non pas à l'OSM (qu'il a quitté le 10 avril 2002 dans les circonstances troubles que l'on sait), mais plutôt au prestigieux Philadelphia Orchestra avec lequel il terminera la saison prochaine une cordiale association de 30 ans pour céder la baguette au jeune Montréalais Yannick Nézet-Séguin.

C'est une page d'histoire musicale qui s'écrit en ce moment.

Inauguré samedi dernier par Nézet-Séguin, le 34e Festival de Lanaudière recevra Dutoit et le Philadelphia vendredi et samedi soirs prochains dans deux programmes centrés sur le répertoire de prédilection du chef suisse : Ravel, Sibelius, Symphonie fantastique de Berlioz.

Le comble eût été que Dutoit choisisse La Mer de Debussy. Étrange hasard, l'oeuvre figurait à son concert de débuts à l'OSM, les 15 et 16 février 1977, et à ce qui allait être son concert d'adieux ici, les 26 et 27 mars 2002... 25 ans plus tard.

Le concert de 1977 avait été si impressionnant que j'avais titré Dutoit : notre prochain chef ? Les dernières années de son règne avaient été moins heureuses et le résultat musical s'en ressentait. Le concert de mars 2002 m'avait inspiré ce titre : Debussy sans magie. C'était le seul de Dutoit ici en près de trois mois. Déjà, il regardait ailleurs. Sept chefs furent appelés à le remplacer pour le reste de la saison.

Dutoit aura 75 ans le 7 octobre, mais il reste toujours très actif. Il vient de diriger à Rome et d'inaugurer la saison de Tanglewood après une visite en Corée du Nord pour la création d'un orchestre de jeunes qui réunirait les deux Corées.

Et il vient d'enregistrer à Londres, avec le Royal Philharmonic, cette séduisante Schéhérazade de Rimsky-Korsakov qu'il avait gravée avec l'OSM chez Decca-London en 1983. Sa nouvelle version est supérieure et illustre son extraordinaire sens du renouvellement, loin de toute routine.

Le discours est cette fois plus incisif, plus nuancé, et porté par une prise de son qui a forcément évolué en un quart de siècle. Les premiers-pupitres de l'OSM restent cependant inégalés, à une exception près : le violon-solo britannique est plus fin et plus expressif.

En complément : de Rimsky-Korsakov encore, une somptueuse Grande Pâque russe, que Dutoit et l'OSM avaient aussi enregistrée.

RIMSKY-KORSAKOV : ROYAL PHILHARMONIC ORCHESTRA, DIR. CHARLES DUTOIT. ONYX, 4064