Depuis huit ans, l'événement MUZ propose de la «musique métissée» créée par des artistes d'ici. Cette année, une quinzaine d'entre eux fouleront les planches de L'Astral pendant trois soirs pour faire découvrir leurs univers au public et aux diffuseurs. Nous en avons parlé avec les fondatrices de l'organisme Vision diversité, Aïda et Paméla Kamar - la mère et la fille -, qui se sont donné comme mission le décloisonnement des styles musicaux et des cultures.

À quoi sert MUZ?

Aïda: Nous avons fondé Vision diversité il y a 12 ans pour mettre de l'avant ce métissage qui fait de plus en plus la force de notre culture. La musique du monde, ce sont les gens d'ailleurs qui viennent nous faire découvrir toutes sortes de musiques. Mais ce sont des artistes québécois qui se produisent à MUZ, et on ne met pas tant l'accent sur leur origine que sur leur expression. Les musiques métissées sont un mélange des influences musicales d'ailleurs avec des traditions d'ici. On ne peut pas être un artiste québécois montréalais sans vivre ce brassage artistique et musical. Nous donnons donc un rendez-vous au public pour qu'il vienne vivre pendant trois soirs une sorte de voyage musical, puisque chaque artiste fait une prestation de 20 minutes.

Pourquoi aller à MUZ?

Paméla: Parce qu'on ne réalise pas à quel point cette scène est riche. C'est pour ça qu'on a voulu faire ça à L'Astral, une salle professionnelle. Ce n'est pas juste de la musique pour danser et faire la fête, ça vaut la peine de s'asseoir et d'écouter dans de bonnes conditions. Les billets ne sont pas chers parce qu'on veut rendre ça accessible, pour que le grand public ait le goût de suivre ces artistes, d'aller voir leurs spectacles et d'acheter leurs albums.

Aïda: Il y a une dimension importante aussi. Ces artistes, lorsqu'ils jouent dans de petites salles, n'ont presque aucune chance d'être vus par les décideurs musicaux ou de la programmation de festivals. La présence de ces partenaires dans la salle pendant ces trois jours, ce n'est pas pour soutenir Vision diversité : ils sont là pour les artistes.

Donc c'est un événement utile?

Paméla: On voit l'impact. Plusieurs artistes qu'on a vus à MUZ ont été nommés Révélation Radio-Canada l'année suivante. Les coups de coeur qu'on remet chaque année, parfois c'est tout ce que ça leur prenait pour leur donner la motivation d'avancer. On essaie ensuite qu'ils aient un accompagnement et un encadrement substantiels. Notre but est que la musique métissée se retrouve aux Francos, au Jazz, au théâtre Outremont, au Palais Montcalm, à Tremblant. Il y a des étapes à passer, les choses ne changent pas du jour au lendemain, mais on voit un changement dans le public. Ce ne sont plus toujours les mêmes visages qu'on retrouve.

Aïda: En fait, à la base de Vision diversité, il y a surtout un gros effort de décloisonnement. On n'a aucune envie d'être catégorisés et mis dans de petites boîtes. C'est pour ça qu'il faut faire connaître ces musiques et les placer au coeur des milieux culturels québécois. Ce ne sont pas des artistes d'ailleurs, ce sont nos artistes québécois.

Est-ce que le débat sur l'appropriation culturelle vous inquiète?

Paméla: Non. On en a déjà parlé avec les artistes. Les Québécois qui font de la musique tzigane ou africaine le font dans le plus grand respect, par amour et passion pour cette culture. Ce ne sont pas des imposteurs, personne ne les a taxés de faire de l'appropriation, et on continue de les appuyer.

Aïda: Il n'y a pas d'appropriation tant qu'il y a un profond respect de chacune des spécificités. Il y a une ouverture, une rencontre, un brassage et un travail en commun qui permettent le décloisonnement. C'est ce qui crée une culture québécoise commune, dans laquelle chacun a sa place et ses apports.

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MUZ, du 18 au 20 octobre, à L'Astral.