Les Dear Criminals sont des enfants chéris en Europe. Après Lettres d'amour, ils travailleront à un projet présenté en 2018 à l'Opéra de Paris.

La voix peut mener loin. Et on ne parle pas ici de l'émission de télévision. Plutôt de celles - qui se marient si bien - de Frannie Holder (Random Recipe) et de Charles Lavoie (b.e.t.a.l.o.v.e.r.s), qui forment les Dear Criminals avec Vincent Legault (Random Recipe).

Le trio vient de terminer la musique du film d'Anne Émond, Nelly, et fait ses premiers pas au théâtre à Espace Go.

«Sans tomber dans l'ésotérisme, quelque chose transcende le fait d'être seulement un musicien dans ce spectacle. On a fait un show récemment et il y avait quelque chose de différent. Je plaçais davantage mes interventions, comme un embryon de mise en scène», avoue Charles Lavoie.

Avant de se lancer dans leur projet à Paris, leur expérience sur le film Nelly a également ouvert leurs horizons.

«On a eu la chance qu'elle [Anne Émond] tourne des scènes sur nos pièces, explique Vincent Legault. Le film était un peu basé sur notre univers.»

«Autant on s'est plongés dans l'univers de Nelly [Arcan], autant les acteurs étaient dans le nôtre. Anne Émond s'est éloignée de la biographie. C'est un film d'auteur librement inspiré de la vie de Nelly», ajoute Frannie Holder.

Interdépendance

Les Dear Criminals ne sont pas des improvisateurs nés, mais, pour Lettres d'amour, ils ont dû s'investir davantage, la musique étant un personnage de plus dans la proposition de David Bobée.

«Il y a des scènes qui n'auraient pas été dans le spectacle si on n'avait pas improvisé de telle façon en entendant Macha [Limonchik]. C'est le fun de travailler avec un metteur en scène pour qui la musique ne représente pas 20 %, mais bien 80 % du show», indique Frannie Holder.

Charles Lavoie ajoute: «Cette interdépendance est nourrissante pour nous comme groupe, sur le plan personnel et musical. David voulait nos chansons, mais on s'est dit qu'il serait intéressant de créer en cours de route.»

Ce travail en grand ensemble a toutefois exigé quelques ajustements.

«Quand tu fais une chanson, dit Vincent Legault, c'est un monde en soi. Au théâtre, ce n'est pas 12 fois 3 minutes, mais une heure et quart avec de la musique et des silences parfois aussi importants.»

«C'est une autre vision de ce que peut être le théâtre. J'ai hâte de voir la réaction des gens parce que ce genre de pièce est peu fréquent. On n'est pas dans une comédie musicale, même s'il y a autant de musique.»

Même si Frannie Holder est une habituée d'Espace Go, elle pense que ce genre de travail pousse le groupe encore plus loin.

«En musique, un spectacle te donne une émotion qui peut donner des frissons deux jours plus tard. Là, c'est un mélange entre les deux. C'est un objet différent et totalement pertinent. C'est la mission que s'est donnée David de démocratiser le théâtre. Ça nous va totalement.»

Travail intense

Charles Lavoie estime que Lettres d'amour peut attirer un nouveau public au théâtre.

«C'est la première fois de ma vie que j'entre dans un même théâtre deux jours de suite. Quand je dis à des amis qu'il y a un acrobate, une actrice et un band sur le stage, ils répondent qu'ils vont venir.»

À l'évidence, les Dear Criminals ont bossé fort sur ce spectacle qui les prépare à ce qui les attend à Paris.

«C'est beaucoup de travail, conclut Vincent Legault. Quand on sort d'ici, on va se coucher. Mon fils m'a dit ce matin: "papa je pense que tu as assez d'argent, tu peux arrêter de travailler".»