Beyoncé et Jay-Z ont causé la surprise samedi en annonçant en pleine tournée la sortie d'un album commun, Everything is Love, annonce qui a été suivie par le clip Apeshit dans lequel le couple royal de la culture afro-américaine s'offre l'écrin du musée du Louvre pour afficher son pouvoir et son amour. Coup d'oeil sur ce nouveau coup d'éclat.

Sourire avec La Joconde

Plus de 10 millions de vues sur YouTube en 24 heures. Le vidéoclip Apeshit de The Carters (parce que Carter est leur nom civil) ne pouvait éviter d'attirer l'attention des fans, puisque tout ce que font Beyoncé et Jay-Z est suivi à la seconde près comme la vie de la famille royale. Le clip de six minutes s'ouvre sur un ange noir, jeans troués et baskets aux pieds, dans la cour du Louvre. Nous retrouvons ensuite Beyoncé et Jay-Z posant fièrement seuls devant La Joconde (sans la plèbe des touristes), la toile la plus célèbre du musée, avec qui Queen B partage un sourire énigmatique. Sont-ils devenus aussi emblématiques qu'elle? De cet ange noir de la rue à l'occupation du Louvre, doit-on y voir une spectaculaire ascension sociale? En tout cas, dans Apeshit, Beyoncé chante «I can't believe we made it» («je ne peux pas croire qu'on l'a fait»), comme pour souligner la réussite du couple. Mais aussi de la culture afro-américaine: selon Gert Van Overloop, gérant du chorégraphe qui a travaillé sur Apeshit, Sidi Larbi Cherkaoui, «c'est un clip pour affirmer l'égalité de la culture afro-américaine, et plus généralement noire, avec la culture blanche», a-t-il dit au journal Le Parisien.

Une publicité pour le Louvre

De fait, plusieurs commentateurs ont souligné comment les Carter ont investi un musée d'où les Noirs, et leurs arts, ont souvent été exclus, et l'attention accordée à certains détails de toiles célèbres, comme la servante noire des Noces de Cana de Veronèse, le naufragé noir du Radeau de la Méduse de Géricault ou le portrait Une femme noire de Marie-Guillemine Benoist. Mais on peut aussi noter, face à cette culture occidentale blanche épinglée au mur, un peu embaumée dans sa beauté, la vitalité de la culture noire, vivante par ses corps réels qui envahissent le musée, couchés dans les escaliers, juchés sur des podiums, ou ces danseuses qui entourent Beyoncé devant Le sacre de Napoléon, gigantesque toile de David, devant laquelle Beyoncé et ses chorégraphes ne s'agenouillent pas comme le fait Joséphine (la féministe Queen B ne ferait jamais ça!). Bref, Apeshit est aussi en quelque sorte un clash admiratif mais critique, entre la culture pop et la culture classique, qui est en même temps un sacré coup de pub pour le Louvre, le musée le plus visité du monde (dont les Carter sont fans, paraît-il). La direction du Louvre a refusé de dire combien elle avait reçu pour la réalisation du vidéoclip, mais a admis «vouloir toucher un public plus large». Françoise Benhamou, ancienne administratrice du musée, a salué «l'idée de faire vivre le Louvre autrement, de montrer que ce n'est pas une vieille institution, que la musique et la danse peuvent dialoguer avec les beaux-arts».

L'album de l'amour retrouvé?

La presse à potins a suivi avec grand intérêt les problèmes du couple Carter, dont Beyoncé et Jay-Z se sont eux-mêmes inspirés dans leurs précédents albums. Elle a parlé de l'infidélité de son mari sur Lemonade, il est revenu sur le sujet en s'excusant sur l'album 4:44 et a déjà confié en entrevue que le couple était allé en thérapie. Samedi soir sur scène à Londres, en pleine tournée européenne de On the Run II, ils ont annoncé la sortie d'un album commun, Everything is Love, qui contient neuf titres. Proposé d'abord en exclusivité sur la plateforme Tidal, propriété de Jay-Z, Everything is Love est maintenant offert sur iTunes et Spotify.

On dirait l'album de l'amour revenu en force, qui commence avec Summer, où Beyoncé dit «faisons l'amour en été», tandis que sur Lovehappy, la dernière chanson, on revient sur les difficultés passées et sur la réconciliation. «Tu m'as fait des choses, garçon, mais l'amour est plus profond que ta douleur, je crois que tu peux changer», chante Beyoncé.

L'album contient aussi des flèches politiques, par exemple lorsque Jay-Z chante sur Apeshit «J'ai dit non au Super Bowl, vous avez besoin de moi, je n'ai pas besoin de vous», confirmant qu'il avait refusé l'invitation à se produire au spectacle de la mi-temps. Jay-Z soutient publiquement l'ancien quart-arrière Colin Kaepernick, l'initiateur d'un mouvement contre les violences raciales qui s'est agenouillé pendant l'hymne national, geste vertement critiqué par Donald Trump. Bref, amoureux et engagé, le couple Carter n'a de toute évidence aucune intention de laisser tomber sa couronne.

Photo tirée de Facebook

Le couple royal de la culture afro-américaine formé de Beyoncé et de Jay-Z lors de leur tournée européenne On the Run II