Le public du Métropolis a dû se demander quelle mouche avait piqué Thomas Fersen hier soir. La tsé-tsé peut-être?

Le grand sec français a chez nous un public fidèle, des fans acquis qui semblaient guetter la première occasion de se laisser emporter par sa douce folie. Ils s'en promettaient sans doute quand ils l'ont aperçu dans la pénombre, chapeau sur la tête, les deux jambes arquées logeant dans un pantalon rouge pétant, et les mains pas en reste, cachées dans des chaussures comme sur la pochette de son récent album Thomas Fersen et the Ginger Accident.

Tous les espoirs étaient permis, d'autant plus que ce disque baigne dans une ambiance ludique des années 60 - les Français disent les sixties - avec un petit côté Nino Ferrer. Malheureusement, l'étincelle espérée ne s'est pas vraiment produite.

On savait que le groupe Ginger Accident ne traverserait pas l'Atlantique avec Fersen, mais il y avait là deux cuivres et un claviériste tout à fait capables de compenser l'absence des cordes qui s'envolent sur disque pendant la première chanson, Mais oui mesdames. On s'est vite rendu compte qu'il manquait un peu de gingembre dans la recette.

Les cinq nouvelles chansons qu'ils nous ont balancées en partant n'avaient pas le tonus ni l'énergie du disque. Les éclairages aléatoires n'aidaient pas la cause de Fersen et ses cinq musiciens, trop souvent perdus dans la pénombre sans qu'on pige pourquoi au juste.

La jolie intro gitano-hispanisante de La chauve-souris pendant laquelle le chanteur a pris la pose d'un danseur de flamenco a ravivé les espoirs. Les fans les plus enthousiastes se sont mis à chanter, timidement.

Puis il y a eu Croque, au carrefour de la chansonnette surréaliste et du folklore, très réussie, un monologue sur un type qui a vu une soucoupe volante dans l'bois et Zaza, qui pue comme chacun le sait. Le Métropolis s'est réchauffé le temps du Chat botté et surtout de Saint-Jean-du-doigt quand, après 50 minutes à peine, Fersen a dit merci, bonsoir.

«On était déjà dans les bagnoles», a blagué au retour le chanteur avant de se lancer dans un segment unplugged, accompagné uniquement de la guitare du fidèle Pierre Sangra. Les autres sont venus les retrouver et, enfin, on a senti que le jello prenait pendant les nouvelles Donne-moi un petit baiser et Les femmes préfèrent, délicieuse.

Fersen a échangé davantage avec son public et on a goûté son humour coquin quand il s'est assis au piano pour finir la soirée. Une soirée qui ne comptera pas parmi les plus mémorables qu'on a passées avec lui depuis une vingtaine d'années.