Quel curieux spectacle que ce Queen Extravaganza qui a attiré un peu plus de 5000 spectateurs au Centre Bell mercredi après avoir fait salle comble au Théâtre Saint-Denis en mai dernier. Ce groupe rejeton de Queen, on l'a dit, a été formé à la suite d'un vaste processus d'auditions et a obtenu la bénédiction de deux ex-Queen, le guitariste Brian May et le batteur Roger Taylor, directeur musical du spectacle.

Queen Extravaganza n'est pas la reproduction maniaque d'un spectacle de Queen comme le fait The Musical Box avec Genesis ni la grand-messe à laquelle nous convient les meilleurs groupes clones de Pink Floyd. C'est plutôt un joyeux happening construit autour de chansons rassembleuses et dont la réussite tient surtout au talent étonnant du chanteur Marc Martel, l'un des deux Québécois du groupe avec le bassiste François-Olivier Doyon.

Après une version accélérée de We Will Rock You servie par trois dignes héritiers (guitare-basse-batterie) des métalleux poilus d'antan, le Montréalais d'origine établi au Tennessee s'amène pour chanter Killer Queen. Immédiatement, un constat s'impose: Martel compose un Freddie Mercury à la hauteur des énormes attentes du public. Sa voix ressemble à s'y méprendre à celle du regretté chanteur de Queen dont il reproduit la démarche et la gestuelle avec un naturel remarquable. Il n'est évidemment pas aussi flamboyant que Mercury et le côté bon enfant avec lequel il débite parfois des lieux communs, en français et en anglais, entre deux chansons le fait se démarquer un peu plus du demi-dieu qu'il incarne, lui permettant du même coup d'éviter de sombrer dans la caricature.

Queen Extravaganza est avant tout le spectacle de Marc Martel. Les producteurs l'ont vite compris en éliminant deux chanteurs du groupe qui en comptait cinq le printemps dernier. Il en reste encore deux autres pleins de bonne volonté - Tyler Warren caché derrière sa batterie et la Texane Jennifer Espinoza -, mais quand Martel s'éclipse le temps d'une chanson, on a tout à coup l'impression de se trouver en présence de l'un de ces innombrables groupes hommage qui font la tournée de boîtes infiniment plus petites que le Centre Bell.

On note aussi dans ce spectacle au volume sonore élevé et aux éclairages nerveux l'utilisation de projections empruntées aux archives de Queen. La vidéo devient essentielle pendant Bohemian Rhapsody, sans doute la chanson la plus casse-gueule du répertoire de Queen. On a eu la bonne idée de laisser les parties les plus périlleuses - l'intro et le segment opératique à plusieurs voix - au vrai Queen qui apparaît à l'écran dans le célèbre vidéoclip de cette chanson. Martel et sa bande font le reste avec panache pendant qu'au parterre des spectateurs chantent, jouent du air guitar ou filment la scène avec leur téléphone comme s'ils avaient devant eux le véritable Queen jouant son classique d'entre les classiques.

Parmi les segments les plus réussis de ces 105 minutes de musique mentionnons Under Pressure, avec Jennifer Espinoza dans le rôle de Bowie, la power ballade The Show Must Go On et l'irrésistible Radio Ga Ga. Par contre, You're My Best Friend manquait de tonus dans la bouche de la chanteuse et il a fallu que Martel s'amène à la rescousse de ses deux amis chanteurs pour que la très attendue Another One Bites The Dust lève vraiment.