La pochette illustrant une rue résidentielle montréalaise. Les textes des chansons. Le lieu de notre rencontre, au coeur du Plateau Mont-Royal. Tous ces détails se rattachent au concept du quatrième album de Philippe B, qui porte un nom fort joli: Ornithologie la nuit. L'histoire d'un gars qui reprend goût à la vie au terme d'un cycle d'une année.

Philippe B s'est cassé et gratté la tête. Il ne voulait pas répéter l'expérience d'échantillonnages classiques de Variation fantômes ni reprendre le même ton dramatique de rupture. «Je cherchais à éviter de refaire le même disque et de me répéter», dit celui qui a reçu une pluie d'éloges pour son troisième album et multiplié les spectacles grandioses avec le Quatuor Molinari.

Que faire, alors?

Sont nées d'abord deux chansons, L'année du serpent et Calorifère. Puis, il y a eu ce matin où Philippe Bergeron s'est réveillé seul dans l'appartement d'une fille à peine apprivoisée, où il est tombé sur un guide d'ornithologie.

Observer, analyser, comprendre, s'approcher. De l'autre, de l'amour, du bonheur. Pendant toute une année, de l'automne à l'été. Ce concept allait ouvrir la voie à Ornithologie la nuit, un peu à la manière des Quatre saisons de Vivaldi.

Une «fiction autobiographique», dit Philippe B, qui vit véritablement de nuit tel un procrastinateur qui veut se faire pardonner.

Solitude, mon amie

Ornithologie la nuit suit le personnage autofictif Philippe B pendant un an. Il apprivoise la solitude, la nuit, les rues de Montréal, les autres et une rencontre...

La pièce d'ouverture, La complainte du scaphandrier, présente un oiseau blessé. «J'ai peur de remonter trop vite des profondeurs», chante Philippe B.

L'auteur-compositeur est un as pour faire passer des émotions à travers des objets et des images toutes simples. Il ouvre un «biscuit chinois» en ayant perdu la foi, alors que s'amorce la saison du «calorifère», qu'arrive celle du «sommeil des oiseaux», puis celle du film «Jésus de Nazareth à Radio-Canada».

Puis vient la rencontre de la belle Alice «dans son pays des merveilles», qui part en voyage et qui revient pour le faire sentir comme «une luciole dans un pot Mason».

«Dans les textes, j'avais envie de faire quelque chose de plus léger, dit Philippe B. J'ai donc décidé d'utiliser plus d'"english" et de «jewish humor» à la Woody Allen. Quelque chose de plus anecdotique. Or, ce n'est pas nécessairement plus facile.»

Philippe B s'est inspiré de chanteurs folk du quotidien, dont Paul Simon et Jens Lekman. «J'aime la façon dont ils décrivent les émotions et les choses ordinaires de la vie», dit-il.

Avec l'illustration de la pochette, on peut également tracer un parallèle avec les bandes dessinées de Michel Rabagliati.

Les chansons au piano du quatrième album rappellent quant à elles les bandes originales de film de Jon Brion (Eternal Sunshine of the Spotless Mind).

Dans les arrangements, Philippe B a «créé de la lumière avec des cuivres, des harmonies vocales», grâce aux voix féminines d'Amélie Mandeville et d'Audrey-Michèle Simard.

Une pièce comme Biscuit chinois est du Philippe B tout craché. Le principal intéressé ne s'en cache pas: il a ses habitudes d'auteur-compositeur. «C'est pour cela que j'aime me mettre au défi avec un cadre créatif.»

Philippe B, le réalisateur

Au cours des deux dernières années, Philippe B a réalisé des albums pour Groenland, Les soeurs Boulay et Carl-Éric Hudon. Il a aussi partagé la tâche avec Benjamin Biolay pour le nouveau disque d'Isabelle Boulay. «Quand je suis réalisateur, je suis au service de l'artiste, qui a le dernier mot. J'aime me retrouver dans ma bulle et pouvoir tout contrôler», dit-il.

Philippe B partagera d'ailleurs la scène du Théâtre Maisonneuve avec Isabelle Boulay le 21 juin pendant les FrancoFolies. Il se produira également dans l'intimité du Gesù, le 19 juin.