Yannick Nézet-Séguin, qui vient de faire ses débuts au Metropolitan Opera de New York dans une nouvelle production de Carmen de Bizet, est le cinquième chef canadien invité par le plus important théâtre lyrique du monde.

Wilfrid Pelletier fut le premier: il y dirigea de 1922 à 1950, d'abord comme assistant, éventuellement comme spécialiste du répertoire français. C'était à l'époque de l'ancien «Met» de la 39e Rue, inauguré en 1883. Le nouvel immeuble de 3800 places, ouvert en 1966 au Lincoln Center, reçut Mario Bernardi en 1984 pour Rinaldo de Handel et, plus récemment, Jacques Lacombe pour Werther de Massenet en 2004 et Bernard Labadie pour Die Zauberflöte de Mozart en septembre dernier.

 

Par ailleurs, deux metteurs en scène canadiens y ont signé des productions. Robert Carsen y monta Evgueny Onieguine de Tchaïkovsky en 1997, cependant que l'audacieux travail de Robert Lepage sur La Damnation de Faust de Berlioz, en 2008, incita la direction à lui confier sa Tétralogie du prochain quart de siècle. Très attendu, le Wagner de Lepage prendra l'affiche à l'automne.

On compte également un Canadien parmi ceux qui occupèrent le fauteuil de directeur général. L'Ontarien Edward Johnson administra le «Met» de 1935 à 1950 après y avoir chanté ténor pendant une douzaine d'années. Aux fonctions plus discrètes de répétitrices, mentionnons Denise Massé et Marie-France Lefebvre.

Enfin, les archives révèlent qu'une soixantaine de chanteurs et chanteuses du Canada et du Québec se sont succédé sur une scène ou sur l'autre. Et c'est une femme qui ouvrit le défilé: la légendaire Emma Albani, native de Chambly, en 1891.

Tous nos grands ténors s'y sont produits à leur tour: Raoul Jobin en 1940, Jon Vickers en 1960, Léopold Simoneau et Richard Verreau tous deux en 1963, Ben Heppner en 1991, Richard Margison en 1995; des ténors moindres aussi, comme Nicolas Massue en 1936 et Jacques Gérard en 1942. Chez les basses: Denis Harbour en 1949, George London en 1951, Joseph Rouleau en 1984, sans oublier les deux tandems père et fils de barytons: Louis Quilico et Gino Quilico, Victor Braun et Russell Braun.

Les chanteuses ne sont pas en reste: Pierrette Alarie en 1945 (et donc bien avant son mari Simoneau), Teresa Stratas en 1959, Judith Forst en 1969, Maureen Forrester en 1975, Nicole Lorange en 1983. On se rappellera aussi la radiodiffusion en direct du 20 décembre 1975 où les trois rôles féminins de Cosi fan tutte de Mozart étaient tenus par trois Montréalaises: Clarice Carson en Fiordiligi, Huguette Tourangeau en Dorabella et Colette Boky en Despina.

La nouvelle génération est représentée par Michèle Losier, Joseph Kaiser, John Relyea, Gerald Finley, Alexandra Deshorties, auxquels se joindra Julie Boulianne la saison prochaine. Et Nézet-Séguin qui est engagé au Metropolitan pour cinq ans, à raison d'un nouvel opéra par année. Comme quoi l'«invasion» du «Met» par les Canadiens et les Québécois est loin d'être terminée!