L'auteure, compositrice et interprète californienne Eleni Mandell ravivera son histoire d'amour avec Montréal ce soir en présentant les chansons de son nouvel album, Artificial Fire, au Divan Orange. Un lieu intime qui sied bien à son répertoire fait de chanson folk, de jazz et maintenant de rock.

Près de 4000 km (et 15 cm de neige) séparent Los Angeles et Montréal. Pourtant, Eleni Mandell entretient un lien particulier avec notre métropole. L'agence de promo (et label, et maison de gérance) Bonsound la traite aux petits oignons depuis des années. Elle a même déjà convaincu Eleni Mandell de chanter en français pour le public d'ici.

 

La musicienne nous offre d'ailleurs quelques salutations en français: «Je ne sais pas, je sens vraiment que j'ai le français dans la peau, dit Eleni Mandell, jointe chez elle, à Los Angeles. Je ne le pratique pas assez, ma compréhension est encore trop faible, la langue est difficile à apprendre. Mais j'ai des amis au Québec, ils m'ont vraiment fait découvrir l'âme de Montréal. Je me sens bien, chez vous, c'est difficile à expliquer...»

Sous-estimée

Reste que, malgré ses séjours répétés au Québec, malgré le grand succès d'estime dont elle jouit en Amérique du Nord depuis la sortie du fragile Miracle of Five (2007) et la grande tenue de cet Artificial Fire, Eleni Mandell demeure une artiste confidentielle. Sous-estimée? «Pas assez écoutée, nuance-t-elle avec cette voix ambrée qui habite chacun de ses enregistrements. Je crois que je suis chanceuse parce que je lis plein de belles choses à propos de ma musique. Je ne pense pas être sous-estimée - je dirais plutôt que je ne vends pas assez d'albums...»

«Je suis underground, alors que je devrais être overground», suggère-t-elle. Bien dit. D'ailleurs, si Feist le peut, pourquoi pas Mandell? Trop sérieuse, trop grave, peut-être?

L'ombre de Tom Waits

D'accord, les thèmes de ses chansons, toujours très personnelles, ne sont pas particulièrement roses. Ses références musicales traînent aussi une histoire hantée de thèmes sombres: le groupe punk The X («la raison pour laquelle je fais ce métier», assure-t-elle) et Tom Waits. «On a tous nos modèles. Moi, c'était Tom Waits. Lorsque j'ai commencé à composer, j'ai voulu l'imiter. J'ai tellement écouté ses disques... Je crois cependant que j'ai réussi à tourner la page sur lui, grâce à Artificial Fire. Il faut, à un moment donné, briser le moule, prendre ses distances.»

Eleni Mandell s'est fait un nid dans la chanson jazzée touchant au folk et à la pop, souvent taciturne, richement imagée, comme chez son idole Waits. Miracle of Five, peut-être la meilleure collection de chansons de toute sa discographie, signifiait la fin d'un cycle. Artificial Fire en amorce un autre, plus musclé, plus viril, dansable même, insiste la musicienne.

Le jeu de son guitariste Jeremy Drake, très présent sur chacune de ces nouvelles chansons, contribue à l'apparente «modernisation» du style de Mandell. Rien de calculé: «J'écris mes chansons de manière très spontanée, sans aucun a priori, sans même penser à ce que mes fans pourraient espérer d'un de mes nouveaux albums. Lorsque je serai une vieille chanteuse, je pourrai regarder derrière moi et être fière d'être demeurée intègre. Je crois aussi que, en général, les spectateurs sont réceptifs à un artiste honnête. J'espère aussi qu'ils seront réceptifs à mon côté plus électrique.»

Ainsi, le Divan Orange sera l'endroit parfait pour tester autant les nouvelles chansons que leurs nouveaux habits musicaux. Les fans ici ne sont pas forcément légion, mais ils sont depuis longtemps fidèles. Tout est dans ce lien étroit qu'Eleni entretient avec notre ville, une relation passionnée qui cache tout de même un peu de haine, s'il faut en croire le texte d'Artificial Fire, la chanson-titre de son septième album studio.

Une histoire d'amour qui flanche, campée dans la métropole: «Late one night, Montreal/Found the treasure at last/It was artificial fire...» N'en doutez point, Eleni Mandell n'est pas un feu de paille, et encore moins artificielle.

Eleni Mandell se produit ce soir, à 22h, au Divan Orange.