Il y a bientôt 20 ans, le 1er janvier 1995, le Réseau de l'information (RDI) entrait en ondes. Aujourd'hui, on peut dire que l'arrivée de la chaîne d'information continue dans le paysage médiatique québécois a complètement bouleversé la façon dont les Québécois s'informent.

Avec la naissance de RDI, soudain, les gens n'avaient plus besoin d'attendre le Téléjournal de 22 heures pour savoir ce qui se passait. Le Réseau de l'information s'est rapidement imposé comme un incontournable lors des grands événements et des tragédies. Les inondations du Saguenay, le 11-Septembre, Mégantic, les commissions Gomery, Bastarache et Charbonneau... RDI est devenu le lieu de rendez-vous (avec LCN qui est arrivé deux ans plus tard, en 1997).

« L'arrivée de RDI a permis la démocratisation de l'accès à l'information, observe Pierre Barrette, professeur à l'École des médias de l'UQAM. Pour des événements à la temporalité lente, comme la commission Charbonneau, par exemple, c'est important. Avant, on avait droit à des résumés mis en bouche par les journalistes. Aujourd'hui, grâce à RDI, le public a accès à l'information brute. »

NOURRIR LA BÊTE

Alors que les chaînes d'information américaines sont marquées idéologiquement - Fox News est à droite, MSNBC plutôt à gauche -, les chaînes d'information continue québécoises sont plutôt neutres. « Aux États-Unis, Fox News et CNN ont contribué au sentiment d'insécurité dans la population, estime Pierre Barrette. Au Québec, ce n'est pas le cas. Par contre, nous partageons avec nos voisins du Sud l'obsession du breaking news, la fameuse "émission spéciale" de RDI. »

Il demeure que les réseaux d'information qui couvrent un même événement 24 heures sur 24 peuvent parfois manquer de distance par rapport à une nouvelle, une catastrophe ou une tragédie. « On assiste à une hypertrophie de l'événement, note Pierre Barrette. Et des événements importants comme Mégantic - où tous les journalistes sont présents sur les lieux - sont boursouflés, comme si les réseaux se sentaient obligés d'en rajouter une couche parce que tout le monde est là. »

RAJEUNIR L'AUDITOIRE

Au fil des ans, RDI s'est bien installé dans les habitudes d'écoute des Québécois. Aujourd'hui, il attire en moyenne 2,8 millions de téléspectateurs par semaine. Mais à 20 ans, le Réseau fait face à plusieurs défis. Le premier : son auditoire vieillit. « Le téléspectateur moyen a 60 ans, note Paule Genest, première directrice à RDI. Il faut renouveler l'auditoire. »

Le second défi : la baisse d'écoute de la télévision en information, qui touche tous les réseaux. Selon les plus récents chiffres compilés par les chercheurs du Centre d'études sur les médias de l'Université Laval, la consommation quotidienne d'information, tous médias confondus, est passée de 84 à 96 minutes depuis 2007. Mais c'est le web qui a gagné des adeptes, pas la télévision, qui a perdu 5 % de son auditoire. En 2013, seulement 35 % des gens l'identifiaient comme première source d'information, alors que la proportion était de 41 % en 2007.

« L'autre défi, c'est la mobilité, note Paule Genest. Il faut aller chercher les gens, surtout les jeunes, là où ils sont. Sans compter qu'il faut être présent sur les réseaux sociaux vers lesquels les gens se tournent quand une nouvelle éclate. Enfin, il faut développer de nouveaux formats, présenter nos nouvelles autrement afin de mettre en valeur nos contenus qui sont riches et variés. On travaille là-dessus. »

« La nouvelle écologie de l'information force tout le monde à se redéfinir et à se repositionner, confirme le professeur Pierre Barrette. Cela dit, on ne pourrait pas vivre sans RDI maintenant qu'il existe. Il demeure toujours pertinent. »