(Ottawa) Une scène digne d’un film s’est produite au Château Laurier, à Ottawa : un voleur s’est emparé du célèbre portrait du premier ministre britannique Winston Churchill The Roaring Lion, photographié par Yousuf Karsh en 1941, et l’a remplacé par une réplique.

C’est un employé de l’hôtel de la capitale fédérale qui a remarqué, vendredi, que le portait n’était pas accroché correctement dans le Reading Lounge. En comparant avec les autres œuvres dans le salon, il a constaté que le portrait de Churchill était différent.

Un examen plus approfondi a permis de confirmer que la photo de Churchill installée dans le cadre n’était pas l’originale. Même si la découverte a été faite vendredi, il n’a pas été possible de savoir depuis combien de temps la contrefaçon était en place.

La directrice générale du Château Laurier, Geneviève Dumas, a souligné par voie de communiqué que le personnel de l’hôtel est « extrêmement triste à la suite de cet acte odieux ».

Les forces policières ont été mises au courant du vol et l’hôtel a lancé un appel à tous afin de récolter des informations sur ce qui a pu se passer.

« L’hôtel est extrêmement fier d’accueillir la merveilleuse collection de Karsh, qui a été installée sécuritairement en 1998 », a ajouté Mme Dumas.

Six des portraits de la collection sont installés dans le Reading Lounge, tandis que neuf autres sont accrochés dans la suite Karsh.

Les cinq autres photos du Reading Lounge ont été retirées jusqu’à ce qu’elles puissent être accrochées de façon plus sécuritaire.

Yousuf Karsh et sa femme ont vécu au Château Laurier pendant 18 ans. Le studio du photographe y a été installé pendant 20 ans, à partir de 1972, et plusieurs portraits célèbres s’y trouvaient, dont celui de Nelson Mandela pris en 1990.

Selon ce qu’on peut lire sur le site de Yousuf Karsh, le portrait de Churchill a « changé sa vie ». La photo a été prise après un discours que celui qui était alors premier ministre britannique avait livré à la Chambre des communes du Canada, le 30 décembre 1941.

Lors de son allocution, Churchill a commencé par remercier les Canadiens pour leurs efforts en temps de guerre. Il a également parlé de l’effondrement de l’armée française et de l’échec du gouvernement français.

« Lorsque j’ai prévenu le gouvernement français que la Grande-Bretagne continuerait seule la lutte, quelle que fût sa décision, les généraux ont déclaré au premier ministre et à un cabinet divisé : “D’ici trois semaines, l’Angleterre se sera fait tordre le cou comme un poulet.” Quel poulet ! Quel cou ! », a-t-il lancé.

Karsh a raconté avoir attendu dans la salle du président après le « discours électrisant » pour prendre une photo, mais Churchill a « grogné » qu’il n’avait pas été informé.

Le premier ministre a refusé de poser son cigare – et c’est ce qui s’est passé ensuite qui lui a permis d’immortaliser la célèbre pose.

« J’ai fait un pas vers lui et, sans préméditation, mais avec beaucoup de respect, je lui ai dit : “Pardonnez-moi, monsieur” et j’ai arraché le cigare de sa bouche », explique le photographe dans un passage de son site Web.

« Le temps que je revienne à ma caméra, il avait l’air tellement agressif qu’il aurait pu me dévorer. C’est à cet instant que j’ai pris la photo. »

Le portrait a été ajouté au billet britannique de cinq livres en 2016, 14 ans après la mort du photographe.