Les deux principales agences de conseil en vote, Glass Lewis et International Shareholder Services (ISS), émettent de sérieuses réserves sur la rémunération des hauts dirigeants de Bombardier.

Glass Lewis recommande carrément aux actionnaires de voter contre l'approche de l'entreprise en la matière, tandis qu'ISS suggère de l'accepter, mais de façon « contestée ». Les grands investisseurs retiennent les services de ces firmes pour les conseiller sur les votes qui se tiennent lors des assemblées annuelles des actionnaires.

Les deux agences reprochent à Bombardier une certaine opacité sur la façon dont le comité des ressources humaines du conseil d'administration a établi la rémunération de ses patrons, plus particulièrement les primes de rendement. Invoquant des raisons concurrentielles, Bombardier donne cette année moins de détails qu'auparavant sur les cibles que ses hauts dirigeants doivent atteindre.

« Le manque d'information à propos des cibles de performance des programmes incitatifs à court et à long terme complique la tâche des actionnaires qui souhaitent établir le niveau de performance atteint et le caractère opportun des versements qui y sont associés », écrit ISS dans son rapport sur Bombardier.

Glass Lewis relève que la prime en argent du PDG, Alain Bellemare, est passée d'un maximum de 140 % de son salaire de base en 2015 à 160 % en 2016 « sans explication particulièrement significative ». De plus, la firme note que Bombardier a atteint 98 % de ses objectifs financiers pertinents en 2016, mais que la prime à court terme de M. Bellemare s'est établie à 142 % de la cible.

Dans des notes de bas de page, Bombardier indique que la prime en argent d'Alain Bellemare a été « ajustée » à la hausse « suivant l'évaluation favorable par le conseil d'administration de la performance individuelle » du dirigeant. Or, écrit Glass Lewis, « la transposition des réalisations financières et qualitatives en dollars versés [sous forme de prime] manque de clarté ».

L'augmentation du niveau des primes des hauts dirigeants de Bombardier « mérite un examen approfondi », compte tenu du fait, notamment, que l'entreprise a reçu des investissements de la part d'entités gouvernementales pendant l'année, estime Glass Lewis.

TOWERS WATSON DANS LA LIGNE DE MIRE

L'agence américaine s'interroge par ailleurs sur l'impartialité du consultant en ressources humaines Towers Watson, qui a conseillé Bombardier. La firme a reçu 63 800 $US pour son travail sur la rémunération de la haute direction de Bombardier et 2,8 millions US pour d'autres services. « Lorsqu'un consultant reçoit des revenus substantiels pour fournir d'autres services à une entreprise, un conflit d'intérêts surgit et on peut raisonnablement contester son objectivité », écrit Glass Lewis.

Cela dit, Glass Lewis constate que de façon générale, la rémunération des hauts dirigeants de Bombardier est alignée avec le rendement de l'entreprise et qu'elle demeure « relativement faible » par rapport à celle de sociétés internationales comparables.

De son côté, ISS reconnaît que la décision du président du conseil d'administration Pierre Beaudoin de ramener sa rémunération pour 2016 au niveau de 2015 et celle de reporter de 2019 à 2020 le versement de certaines primes aux autres hauts dirigeants font passer sa « préoccupation » sur la question d'un niveau « élevé » à « moyen ».

Rappelons que le mois dernier, des citoyens ont manifesté à deux reprises devant le siège social de Bombardier pour protester contre la rémunération des hauts dirigeants de l'entreprise, fait rare dans le monde des affaires au Canada.

Des groupes sociaux prévoient d'organiser un « comité d'accueil » lors de l'assemblée des actionnaires de Bombardier, qui se tiendra le jeudi 11 mai au Centre de finition des avions d'affaires Global, à Dorval.

Glass Lewis appartient au Régime de retraite des enseignants de l'Ontario (Teachers) et à l'Alberta Investment Management Corporation.