L'opposition à Québec a concentré ses tirs mercredi sur le président du conseil d'administration de Bombardier, Pierre Beaudoin, à qui on reproche de gagner bien plus que ses homologues malgré les déboires de l'entreprise.

Le chef caquiste François Legault a notamment souligné que le président du c.a. d'Airbus en Europe gagnait 240 000 euros par an, celui de Boeing 326 000 $ US, tandis que M. Beaudoin empoche 5 millions CAN, même après avoir renoncé à sa toute dernière hausse de salaire.

Le premier ministre Philippe Couillard a néanmoins martelé en Chambre qu'il n'avait pas l'intention de s'ingérer dans les politiques de rémunération de l'entreprise.

«Je ne crois pas qu'il appartient au gouvernement de se mêler des affaires internes des entreprises, à moins d'en être copropriétaires, à moins d'y être sur le conseil d'administration, ce n'est pas le cas», a-t-il dit à la période de questions.

«Le premier ministre du Québec a été déculotté lorsque je lui ai appris que les présidents des c.a. d'Airbus et Boeing gagnaient 15 fois moins que celui de Bombardier, il n'a vraiment eu aucune réponse, il ne savait pas, il était tout rouge, cela n'a pas de bon sens», a déclaré M. Legault en conférence de presse après la période de questions.

Il lui demande de convoquer M. Beaudoin pour le forcer à réduire son traitement, étant donné que Bombardier a été maintenue à flot grâce aux fonds publics.

Le chef péquiste Jean-François Lisée a quant à lui pris un autre étalon de comparaison, soit le président de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Robert Tessier, qui gagne 200 000 $ par an, pour un portefeuille de 210 milliards.

«Est-ce que le premier ministre considère que M. Tessier est sous-payé ou que M. Beaudoin est surpayé?» a demandé M. Lisée à la période de questions.

«Comparer Bombardier à la Caisse de dépôt, ça n'a pas de bon sens, a répliqué M. Couillard. Il faut comparer Bombardier à Lockheed, à Boeing, à Airbus, à Embraer, qui sont ses concurrents.»

Par ailleurs, l'Assemblée nationale allait débattre mercredi après-midi d'une nouvelle motion de l'opposition demandant aux hauts dirigeants de Bombardier de renoncer à leurs augmentations de rémunération pour 2016.

C'est le Parti québécois qui est revenu à la charge avec cette motion, après le refus du gouvernement libéral de débattre de trois motions semblables mardi.

Toute cette controverse est née de l'annonce d'une hausse de près de 50 % de la rémunération globale de six hauts dirigeants de Bombardier la semaine dernière. Le PDG, Alain Bellemare, voyait sa rémunération passer de 6,4 millions US à 9,5 millions US, tandis que le président du conseil d'administration, Pierre Beaudoin, voyait la sienne gonfler de 3,8 millions US à 5,2 millions US.

Un tollé s'en est suivi dans l'opinion publique parce que l'entreprise a été sauvée de la faillite en 2015 par une injection massive de fonds publics, notamment 1,3 milliard d'Investissement Québec et 2 milliards de la Caisse de dépôt, en plus du prêt de 370 millions accordé par Ottawa.

De surcroît, la multinationale prévoit mettre à pied 14 500 employés d'ici à la fin de 2018. En 2016, elle a encaissé une perte de près de 1 milliard.

Bombardier a dû faire marche arrière et a finalement reporté d'un an, de 2019 à 2020, l'attribution des bonis. La deuxième moitié des 32 millions US sera donc versée en 2020.

M. Bellemare devra donc se contenter de 4,2 millions US. Il a attribué cette tempête politique à une erreur de communication. Quant à M. Beaudoin, il a renoncé à la majoration de sa rémunération.