Le premier ministre Justin Trudeau se donne jusqu'au dépôt de son premier budget, prévu dans la semaine du 21 mars, pour décider ou non d'investir dans Bombardier.

« On reconnaît l'importance de l'industrie aéronautique, pas juste pour Montréal, mais pour l'économie du pays. Investir dans le secteur manufacturier, dans la haute technologie, c'est l'avenir du Canada, on le comprend. Tous les députés de Montréal et du Québec ont souligné au ministre de l'Innovation [Navdeep Bains] à quel point Bombardier est important pour nous », a déclaré M. Trudeau en rencontre éditoriale à La Presse, hier. Le chef du gouvernement a prévenu qu'il allait garder la tête froide dans ce dossier.

« Est-ce la bonne façon d'investir, est-ce que c'est bon pour l'économie canadienne, est-ce que c'est bon pour les contribuables canadiens d'investir dans cette compagnie ? a-t-il demandé. Nous allons prendre cette décision en nous basant sur les faits, sur la réalité et non pas sur l'intérêt politique. Parce que ce qui est bon pour un député de Montréal n'est pas nécessairement bon pour un député de Toronto ou de Calgary. »

Il semble donc que l'annonce d'une éventuelle aide fédérale ne coïncidera pas avec la publication des résultats annuels de Bombardier, mercredi prochain. En octobre dernier, le gouvernement Couillard avait profité de la divulgation des résultats trimestriels de Bombardier pour s'engager à effectuer un investissement de 1 milliard US (1,4 milliard CAN) qui doit lui donner une participation de 49,5 % dans le programme de la C Series. Aux prises avec les dépassements de coûts et la pénurie de commandes de cette nouvelle gamme d'avions, Bombardier tente depuis lors de convaincre Ottawa de contribuer à la même hauteur.

Depuis l'annonce d'octobre, l'action de Bombardier a chuté de plus de 50 % à la Bourse de Toronto, de sorte que la participation de 1,4 milliard de Québec dans la C Series vaut presque autant que l'entreprise au complet, soit 1,9 milliard.

PLAN B À QUÉBEC ?

À l'Assemblée nationale hier, le député caquiste André Lamontagne a demandé au ministre québécois des Transports, Jacques Daoust, s'il avait un « plan B » dans l'éventualité où le gouvernement fédéral déciderait de passer son tour. Le ministre a répondu avoir « bon espoir » qu'Ottawa monte à bord.

« On est dans des discussions avec Bombardier, on regarde de très près ce qui se passe avec le gouvernement fédéral, a-t-il expliqué. Et si, au 31 mars, il n'était pas présent, le gouvernement du Québec aura une décision à prendre. Mais on a toujours appuyé Bombardier, c'est un fleuron de notre économie et on va continuer de le faire. »

Invitée à clarifier les propos ambigus de M. Daoust, sa porte-parole, Mélissa Turgeon, a martelé que Québec « ne mettra pas plus d'argent » dans le sauvetage de Bombardier, peu importe la décision d'Ottawa.

Dans un communiqué publié par Bombardier en octobre, on indiquait que « les ententes définitives seront signées au plus tard le 1er janvier ou à toute autre date dont la société et le gouvernement peuvent convenir ». Mme Turgeon a précisé hier qu'on visait désormais le 31 mars, ce qui permettra d'effectuer un premier versement de 500 millions US le 1er avril, comme convenu.

Par ailleurs, en réponse à la polémique que suscite la possibilité d'une aide fédérale à Bombardier, l'entreprise a senti le besoin de chiffrer son apport à l'économie du pays. Dans un document de promotion récemment placé sur son site web, Bombardier soutient que ses activités génèrent 24 340 emplois directs ainsi que 40 460 emplois indirects et « induits ». Le groupe évalue à 12,4 milliards sa contribution au produit intérieur brut du Canada en 2013, soit 0,7 % du total. Enfin, les recettes fiscales versées par Bombardier et ses salariés aux différents ordres de gouvernement totaliseraient 1,3 milliard par année.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE - Mirabel --- Premier vol de l'avion CS300 et visite du hangar de Bombardier aeronautique de l'aéroport de Mirabel. En photo: Un CS100 avec ses moteurs Pratt & Whitney. --- -27 Fevrier 2015 -AFF # 736765