La Chine aura besoin de 6330 avions de ligne sur les 20 années à venir, selon des prévisions dévoilées mardi par Boeing, et révisées en nette hausse par rapport à l'an dernier en dépit du ralentissement persistant de la deuxième économie mondiale.

Ces nouveaux appareils, à 73% des monocouloirs, représenteront une valeur marchande cumulée de 950 milliards de dollars sur la période 2015-2034, a précisé l'avionneur américain.

Le groupe a nettement relevé ses anticipations: l'an dernier, il ne tablait que sur 6000 nouveaux avions livrés à la Chine sur les vingt années à venir.

«Malgré la volatilité actuelle des marchés financiers (la Bourse de Shanghai s'est effondrée de plus de 40% depuis mi-juin, NDLR), nous attendons une robuste progression du marché chinois à long terme» a assuré Randy Tinseth, vice-président de Boeing.

Certes, la croissance économique du géant asiatique va continuer de s'essouffler, mais elle deviendra «plus durable», avec un renforcement du secteur des services, «de bon augure pour le tourisme» et pour le trafic aérien, a expliqué M. Tinseth à Pékin devant quelques journalistes.

Selon la nouvelle projection de Boeing, la Chine comptera pour presque 17% des quelque 38 000 avions de ligne vendus dans le monde au cours des deux prochaines décennies.

De même, la récente dévaluation du yuan face au dollar --ce qui renchérit le coût des avions neufs pour les compagnies chinoises-- ne devrait pas avoir d'impact décisif sur les commandes, a estimé le responsable de Boeing.

«Le facteur le plus important pour les compagnies restent la chute des cours du pétrole sur l'année passée, qui leur permet de gagner en rentabilité» en réduisant leurs factures de kérosène, a-t-il souligné.

En Chine, seuls 27% des appareils neufs livrés serviront à remplacer de vieux avions (contre 42% au niveau mondial), tandis que 73% viendront grossir la flotte du pays: celle-ci va presque tripler en vingt ans, passant de 2570 appareils à 7210 appareils.

La croissance reste dopée par l'essor des vols domestiques et régionaux et par le développement accéléré des compagnies à rabais locales, devenus des clients privilégiés de Boeing.

La Chine devrait ainsi connaître d'ici 2034 une progression de 6,2% par an de son trafic aérien intérieur.

Mais l'enrichissement de la classe moyenne chinoise et l'assouplissement des réglementations de Pékin sur les visas profiteront aussi aux vols internationaux long-courrier des compagnies nationales.

Sur ces derniers, le trafic de passagers devrait tripler entre 2015 et 2021, estime Boeing. Selon l'avionneur, la Chine aura besoin de 1510 appareils long-courrier sur les deux prochaines décennies.

Plus de la moitié des avions actuellement en service en Chine sont des Boeing, et l'américain fait jeu égal avec son rival européen Airbus en termes de parts de marché dans le pays.

Boeing a livré 155 appareils à des compagnies chinoises l'an dernier, soit 21% de ses livraisons mondiales, et se prépare pour 2015 «à des chiffres à peu près similaires».

Le groupe n'envisage pas d'imiter dans l'immédiat la stratégie d'Airbus, qui dispose en Chine même d'une ligne d'assemblage pour moyen-courriers A320 et se prépare à y ajouter un centre d'aménagement intérieur pour gros porteurs A330.

«Nous avons choisi un chemin différent. Mais nous gardons toutes les options ouvertes pour l'avenir», a commenté M. Tinseth.

Sur les prochaines décennies, la croissance du marché aéronautique sera suffisante pour que des constructeurs cherchant à briser le duopole Boeing-Airbus prennent leur envol avec succès, a par ailleurs reconnu le dirigeant.

Concernant notamment le groupe étatique chinois Comac, «la question n'est pas de savoir s'il réussira, mais quand. Il a les ressources et les compétences nécessaires sur le long terme», a-t-il estimé.

Comac développe le moyen-courrier C919, censé concurrencer les appareils vedettes que sont le B737 de Boeing et l'A320 d'Airbus, avec des premières livraisons prévues en 2018.