Depuis l'ouverture, en mai 2011, du pont à péage de l'autoroute 25, 420 000 passages n'ont pas été payés dans les délais requis après l'envoi de factures par la poste aux automobilistes qui empruntent le pont sans transpondeur.

La plus grosse facture impayée dépasse 20 000$. «C'est un automobiliste qui emprunte le pont presque quotidiennement et qui n'a jamais acquitté ses passages», indique Pierre Brien, porte-parole de Concession A25, la firme privée qui administre le péage.

Concession A25 a lancé aux trousses des mauvais payeurs une agence de recouvrement qui a réglé le tiers des dossiers, soit 140 000. Pour les plus récalcitrants, le ministère de la Justice vient de commencer à sévir: 470 d'entre eux ont reçu ces dernières semaines leur première contravention de 230$ en amende et frais pour avoir omis d'acquitter le péage de 2,48$, plus les frais de 5,15$ pour les passages sans transpondeur.

Le pont entre Montréal et Laval a enregistré 24,5 millions de passages dans les 2 années suivant son ouverture. Les passages impayés représentent 1,7% du total et concernent 9000 automobilistes.

Agence de recouvrement: une dernière chance

Quatre-vingt-cinq pour cent des automobilistes qui empruntent le pont à péage ont un transpondeur, ce qui permet à Concession A25 d'enregistrer leurs passages et de débiter leur compte. Pour les autres, des caméras captent les plaques d'immatriculation, et les factures sont envoyées par la poste, assorties de frais administratifs de 5,15$ en sus du péage.

Après deux avis - et des frais de 28$ ajoutés au deuxième -, Concession A25 transmet les dossiers impayés au ministère de la Justice pour l'émission de contraventions. Mais l'été dernier, la firme a fait appel à une agence de recouvrement pour un projet-pilote de trois mois. L'entente vient d'être prolongée. «On veut donner une dernière chance aux clients d'éviter un constat d'infraction coûteux, explique M. Brien. On a été très tolérants dans les premiers mois, mais on resserre de plus en plus notre période de tolérance.»

L'Union des consommateurs reçoit de nombreux appels d'automobilistes mécontents des méthodes de recouvrement de l'agence ARM, mandatée par Concession A25. «Certains se plaignent de pressions et même de menaces», indique Philippe Viel, porte-parole de l'organisme.

Concession A25 soutient que ces problèmes ont été réglés et que l'agence permet maintenant d'échelonner les paiements sur une plus longue période.

Frais administratifs: plus de 20 millions

Selon l'Union des consommateurs, les frais de 5,15$ pour les passages sans transpondeur sont exagérés. Comme 15% des automobilistes n'ont pas l'appareil, ça signifie que ces frais ont été exigés pour plus de 4 millions de passages, pour une somme totale dépassant 20 millions depuis l'ouverture du pont. Sans compter les frais supplémentaires de 28$ à l'envoi du deuxième avis. «Pour un péage de 2$, ce n'est pas justifié», dit Philippe Viel.

L'organisme pilote d'ailleurs un recours collectif au sujet de l'affichage des frais administratifs, qui étaient auparavant annoncés sur un panneau séparé des tarifs de péage. Concession A25 a modifié les panneaux, mais les plaignants soutiennent qu'ils ne respectent toujours pas la Loi sur la protection du consommateur. En autorisant le recours collectif, en janvier dernier, le juge a souligné que le tribunal était «interpellé» par le fait que, pour un péage de 2,48$, la facture totale est de 7,63$, en raison des frais administratifs.

Des guérites devraient permettre aux automobilistes qui le désirent de payer sur-le-champ, comme c'est le cas pour le nouveau pont de l'autoroute 30, selon l'Union des consommateurs. C'est aussi l'avis du CAA. «Il faudrait éviter le plus possible les coûts administratifs pour ne pas décourager les utilisateurs occasionnels», commente Sophie Gagnon, porte-parole de CAA-Québec.

Selon Pierre Brien, un tel système n'est pas envisageable. «Des guérites ralentiraient trop la circulation et réduiraient les gains de temps pour les automobilistes», répond-il.