Un dirigeant de la société allemande MTU Aero Engine a comparé le processus d'attribution d'un ancien contrat d'Aveos à un bazar turc.

Le responsable de la restructuration d'Aveos a attribué ce contrat, portant sur l'entretien des moteurs d'Air Canada, à une autre société allemande, Lufthansa Technik, après quelques jours de marchandage. MTU a décidé de contester le processus d'attribution devant les tribunaux.

«Si j'avais su qu'il s'agissait d'un bazar turc, je n'aurais pas présenté ma meilleure offre dès le début», a déclaré le vice-président au développement des affaires de la division de l'entretien des moteurs chez MTU, Jurgen Kuhn, en Cour supérieure, hier.

Allonger un peu plus d'argent

Il a expliqué que la firme responsable de la liquidation des actifs d'Aveos, FTI Consulting, avait insisté pour que MTU présente sa meilleure offre le 7 août au plus tard, après des semaines de pourparlers. M. Kuhn a donc présenté une offre finale. Or, le 8 août, le responsable de la restructuration, Jonathan Solursh, l'a appelé pour l'inviter à mettre un peu plus d'argent «pour clore la transaction».

«J'étais choqué», a commenté M. Kuhn.

Le lendemain, M. Solursh a communiqué une nouvelle fois avec M. Kuhn pour lui faire savoir qu'il y avait eu un «changement important et inattendu» et que l'autre soumissionnaire, Lufthansa Technik, avait doublé son offre.

«Il a commencé à me crier après, il était désagréable, il n'était pas professionnel, a soutenu M. Kuhn devant le tribunal. Il voulait mettre de la pression sur moi.»

M. Kuhn a soutenu qu'il était clairement indiqué dans les documents que le processus devait prendre fin le 7 août, pas qu'un nouveau processus de négociation commençait.

«Ça semblait louche»

«J'étais très préoccupé, ça semblait louche», a-t-il déclaré.

M. Solursh a toutefois soutenu qu'il avait suivi le processus établi, un processus qui avait été suivi avec succès dans 12 autres transactions liées à la liquidation des actifs d'Aveos. Il a affirmé que les deux parties avaient été traitées de la même manière et qu'elles étaient toutes deux au courant des règles du jeu: il devait y avoir des négociations après la date butoir du 7 août afin d'en arriver à une entente le 10 août.

L'avocat de Lufthansa Technik, Me Luc Béliveau, a affirmé que le processus était transparent et que Lufthansa avait agi de bonne foi.

Le juge Louis Gouin, de la Cour supérieure, a noté qu'il était normal dans une négociation de présenter une première «meilleure offre», quitte à présenter une autre «meilleure offre» quelques jours plus tard.

L'avocat de MTU, Me François Gagnon, a répliqué qu'il ne s'agissait pas ici d'une négociation privée, mais d'un processus d'appel d'offres.

Le syndicat représentant les anciens employés d'Aveos, l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale (AIMTA), appuie l'offre de MTU parce que l'entreprise promet la création de 130 à 150 emplois au Canada. Il n'est cependant pas clair où seront créés ces emplois. La plupart devraient être créés à Vancouver, où MTU a déjà des installations. Toutefois, comme l'espace y est limité, MTU voudrait ouvrir un atelier à Montréal et acquérir si possible l'outillage qui appartenait à Aveos.

Le juge Gouin a indiqué que si le tribunal devait tenir compte de considérations sociales, celles-ci devaient au mois être fermes.

«Dans ce cas-ci, c'est plutôt chancelant», a-t-il déclaré.

Le juge Gouin devrait statuer aujourd'hui sur l'attribution du contrat d'entretien des moteurs.