Le gouvernement Harper ne peut dire si la fermeture d'Aveos place Air Canada en contravention avec la loi fédérale, a indiqué le ministre des Transports, Denis Lebel, hier, au moment où Québec songe à poursuivre Ottawa et l'entreprise pour maintenir les 1800 emplois éliminés à Montréal.

Au cours d'une téléconférence tenue en fin d'après-midi, M. Lebel a rappelé que la loi qui a encadré la privatisation d'Air Canada stipule que la société doit maintenir des centres d'entretien à Montréal, Mississauga et Winnipeg. Mais le ministre n'a pas déterminé si la fermeture d'Aveos, un sous-traitant, fait en sorte que la loi est violée.

«On va suivre les développements concernant tout cela, nous allons examiner les avis qu'on reçoit, a-t-il indiqué. Pour l'instant, il n'y a personne qui dit qu'ils ne respectent pas la loi.»

Le ministre Lebel reconnaît que les travailleurs d'Aveos vivent une «situation désastreuse», et promet de suivre le dossier de près. Mais il maintient que «les décisions d'Aveos sont celles d'une entreprise privée».

Pendant ce temps, à Québec, le gouvernement Charest a fait savoir qu'il envisage de poursuivre Ottawa, pas seulement Air Canada, afin de maintenir à Montréal les emplois mis en péril par la fermeture d'Aveos. Il prépare avec l'Ontario et le Manitoba un front commun pour faire pression sur Air Canada et préserver les activités de son sous-traitant.

Hier, les travailleurs licenciés d'Aveos, dont une centaine s'étaient déplacés à Québec, ont obtenu l'appui unanime des députés dans leur bataille. L'Assemblée nationale a adopté une motion initiée par le Parti québécois qui «invite le gouvernement du Québec à prendre dans les plus brefs délais tous les recours juridiques possibles pour le maintien des centres de révision et d'entretien d'Air Canada à Montréal».

Aveos a fermé ses installations et s'est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers. La société estime avoir perdu 16 millions de dollars en revenus parce qu'Air Canada a réduit ou annulé du travail de maintenance. Mardi, elle a commencé à liquider ses actifs.

«Nous allons tout mettre en oeuvre pour garder les opérations ouvertes, pour voir de quelle façon on peut aider les travailleurs et l'entreprise, a affirmé le premier ministre Jean Charest. Et nous allons examiner tous les recours qui nous sont disponibles, incluant la possibilité de prendre des recours juridiques contre le gouvernement fédéral.»

Ottawa refuse d'intervenir dans le dossier pour le moment. Les travailleurs d'Aveos lui reprochent de ne pas faire respecter sa propre loi.

Une centaine d'entre eux ont manifesté devant le parlement et se sont réjouis de l'appui de l'Assemblée nationale. «C'est une mautadite bonne bataille de gagnée aujourd'hui pour nous autres. Je suis tellement content...», a lancé le président du syndicat, Marcel St-Jean, la voix étranglée par l'émotion.

Le vice-président, Jean Poirier, a exhorté Jean Charest à rencontrer son homologue Stephen Harper. «Il faut que ça bouge. Si demain matin, je vole une banque, on va venir m'arrêter. Là, on demande que les actions soient prises now! Air Canada est hors la loi. Il faut des actions tout de suite!», a-t-il soutenu. Les syndiqués vont se rendre à Ottawa bientôt pour demander des comptes au gouvernement Harper.

«On est à vos côtés, et on veut que vous conserviez vos jobs, leur a affirmé la chef péquiste Pauline Marois. Air Canada doit agir, et le gouvernement fédéral doit agir.»

Mais Sam Hamad se fait prudent.

«Sur le plan juridique, il faut s'assurer qu'on est béton. On ne peut pas aller là, frapper un mur et tomber», a-t-il dit aux journalistes.

Son «premier objectif» est de relancer les activités d'Aveos. La loi sur la privatisation d'Air Canada oblige le transporteur à maintenir ses centres d'entretien et de révision à Winnipeg, Mississauga et Montréal. Hier, Air Canada a rappelé que la Cour supérieure de l'Ontario avait statué que le transporteur respectait cette exigence parce qu'il avait conservé ses activités de maintenance légère des appareils. Ce sont les activités de maintenance lourde, qui implique le démantèlement des avions, qui ont été regroupées dans Aveos.

Le syndicat des employés d'Aveos n'est pas d'accord avec l'interprétation du tribunal ontarien.