Dix ans après leur mise en service, les tramways de Bombardier (T.BBD.B) à Nancy et à Caen, en France, n'en finissent plus de faire couler de l'encre en raison de leur mauvaise performance.

Un rapport du gouvernement français rendu public récemment égratigne le manufacturier et préconise le remplacement des tramways à partir de 2022.

«La mise au point de ce matériel innovant a été initialement préoccupante au regard de la sécurité et sa fiabilité reste globalement décevante, écrivent Christian Bourget et Patrick Labia, du Conseil général de l'environnement et du développement durable. Il s'en suit une disponibilité médiocre et des coûts de maintenance élevés.»

Le nombre d'heures nécessaires pour entretenir les tramways est dix fois plus élevé que ce qui avait été prévu au départ alors que les coûts de maintenance sont cinq fois plus élevés.

Les tramways en question, qui roulent sur des pneus et qui sont guidés par un rail central, ont fait l'objet de telles critiques qu'aucune autre ville n'a voulu en acquérir.

Bombardier en a construit une cinquantaine pour Nancy et Caen avant de mettre fin à leur production.

Le rapport note toutefois qu'à l'heure actuelle, les tramways sont parfaitement sécuritaires et que les passagers les apprécient «en dépit des pannes anormalement nombreuses».

C'est au cours des années 90 que Nancy et Caen ont choisi le tramway sur pneu de Bombardier, dans un climat politique plutôt tendu. Certaines factions préconisaient ce mode de transport, d'autres s'y opposaient farouchement.

À l'époque, les gouvernements plaçaient beaucoup d'espoir dans les modes de transport se situant à mi-chemin entre le tramway sur rail, très coûteux, et l'autobus, polluant et peu confortable. L'État français a d'ailleurs participé à la mise au point de ce transport intermédiaire en finançant les recherches et en subventionnant les villes intéressées, comme Nancy et Caen.

Dès le début, le tramway de Nancy a connu d'énormes difficultés, à commencer par des «pertes de guidage» (l'équivalent d'une sortie de rail). Le problème a forcé Nancy à interrompre le service pendant une année complète.

«Nous reconnaissons qu'au début, le projet a eu des difficultés, a dit le porte-parole de Bombardier Transport, Marc-André Lefebvre. Mais nous avons déployé tous les efforts et investissements nécessaires et, maintenant, le projet fonctionne bien. La fréquentation est en hausse et les utilisateurs sont satisfaits.»

Il a souligné que le rapport recommandait l'utilisation des tramways pour les 10 prochaines années.

Il faudra cependant moderniser les tramways pour assurer le service pendant cette période, au coût de 740 000 euros par véhicule, soit 1 million de dollars canadiens.

M. Lefebvre a affirmé que Bombardier avait cessé la production des tramways sur pneus parce que ce produit répondait à des besoins très précis, et plutôt limités. Le fait de rouler sur pneu permet en effet aux tramways de négocier les pentes abruptes de Nancy et d'effectuer des virages prononcés.

Le rapport note d'ailleurs qu'au cours des années, l'évolution des tramways sur fer et des autobus a permis de combler le fossé entre les deux modes de transport: les tramways sur fer sont devenus plus concurrentiels, les autobus articulés sont plus confortables et moins polluants.

Les villes de Nancy et de Caen devront commencer à étudier dès maintenant ces modes de transport alternatifs pour remplacer les tramways de Bombardier dans une dizaine d'années, écrivent les auteurs du rapport.

M. Lefebvre a soutenu que toute cette controverse n'avait pas eu de conséquences importantes sur la réputation de Bombardier en France.

«On parle de projets très limités, alors que nous sommes un des très grands fournisseurs de train en France, a-t-il affirmé. Le nom de Bombardier est très bien vu.»