Les courtiers de JPMorgan Chase à l'origine d'une perte d'au moins 2 milliards de dollars ne comprenaient pas les risques qu'ils prenaient et la stratégie qu'ils suivaient était mal pilotée, a affirmé Jamie Dimon, PDG de la banque américaine, devant une commission parlementaire mardi.

C'est la deuxième audition parlementaire en une semaine du patron de la première banque américaine en termes d'actifs.

M. Dimon a de nouveau expliqué la lourde perte enregistrée par son bureau d'investissements en propre (Chief investment office, CIO) à Londres en affirmant que la stratégie des opérations, qui étaient sensées couvrir la banque de risques d'exposition à la dette européenne d'entreprises, était «mal conçue».

«La stratégie n'était pas analysée attentivement ou sujette à des tests rigoureux au sein du CIO et n'a pas été examinée en dehors du CIO», a affirmé M. Dimon devant la commission financière de la Chambre des représentants.

«Avec le recul, les courtiers du CIO n'avaient pas la compréhension requise des risques qu'ils prenaient», a-t-il ajouté.

Mercredi, M. Dimon avait déjà attribué la perte dévoilée le mois dernier à des erreurs de jugement et s'était excusé pour les pertes, mais il avait assuré qu'il s'agissait d'un «événement isolé» à l'impact limité au vu des confortables réserves de capitaux du groupe.

Il a de nouveau mis en avant mardi le bilan «en béton» du groupe financier, qui affichait 190 milliards de dollars de capitaux propres, des dépôt totalisant 1100 milliards de dollars et des prêts atteignant 700 milliards de dollars.

«Nous ne parions pas, nous faisons des erreurs», a encore déclaré M. Dimon pour justifier les pertes de sa banque. «Nous avons fait 40 milliards de dollars de prêts immobiliers le trimestre passé, j'imagine que vous vouliez que nous le fassions (...) nous avons perdu deux milliards de dollars en prêtant de l'argent à Chrysler, j'imagine que vous vouliez que nous leur prêtions cet argent», a-t-il argumenté, pour montrer que les pertes sont inhérentes des activités bancaires.

M. Dimon a par ailleurs affirmé que sa banque n'était pas «trop grosse pour faire faillite» (too big too fail) et qu'elle n'aurait donc selon lui jamais besoin du soutien de l'argent public.

Barney Frank, co-auteur de la loi Dodd-Frank de 2010 sur la réglementation financière, a pour sa part remarqué que «ceci n'est pas une audition sur JPMorgan Chase. C'est un exemple d'un problème plus vaste», a-t-il souligné à l'attention des régulateurs ayant participé à l'audition, et qui ont témoigné avant Jamie Dimon.

«Si une banque bien gérée peut enregistrer des pertes de plusieurs milliards de dollars - trois milliards au moins, nous dit-on - en relativement peu de temps, cela montre qu'il y a un problème avec les dérivés», a-t-il insisté.

«Nous nous inquiétons de la prochaine perte de 50 milliards de dollars», a lancé Maxine Waters, élue en Californie.

À la question de savoir si sa banque pourrait perdre jusqu'à 50 milliards de dollars, M. Dimon a répondu: «non, sauf si la Lune s'écrase sur la Terre.»

JPMorgan a annoncé le 10 mai qu'il avait enregistré au moins deux milliards de pertes et probablement 1 milliard de dollars de plus sur le trimestre en cours, sur de mauvaises opérations de courtage de dérivés adossés à la dette d'entreprises européennes. Selon le New York Times les pertes pourraient atteindre 5 milliards de dollars.

Ces pertes sont intervenues alors que Jamie Dimon a été un adversaire déclaré d'un renforcement de la réglementation financière et en particulier de la règle de Volcker, qui vise à limiter les transactions en nom propre des banques ainsi que leurs opérations sur les dérivés.