Un nouvel énoncé de l'Association des banquiers canadiens en faveur du projet fédéral de commission unique de valeurs mobilières place les deux principales banques québécoises, la Nationale (T.NA) et la Laurentienne (T.LB), en situation délicate.

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Le plus important lobby financier au Canada vient de déposer en Cour suprême une opinion en appui complet au projet fédéral, qui est l'objet d'une requête devant le plus haut tribunal au pays.

Dès les premières lignes de cette déposition, l'Association dit s'exprimer au nom de ses «51 banques membres», ce qui inclut les banques Nationale et Laurentienne, établies à Montréal.

Or, en adhérant à cette déposition, ces deux banques se retrouvent en contradiction avec le gouvernement du Québec, qui s'oppose ardemment au projet fédéral de commission unique.

Le Québec et l'Alberta mènent d'ailleurs l'opposition à ce projet fédéral en ayant lancé des contestations juridiques devant leur Cour d'appel respective. Un dénouement est attendu au cours des prochains mois.

Mais, déjà, ce débat sur une commission unique qui remplacerait le réseau actuel de commissions provinciales, dont l'Autorité des marchés financiers (AMF) au Québec, est un sujet controversé dans le milieu financier québécois.

Alors que certains tiennent au maintien d'une juridiction québécoise sur les services financiers, d'autres prétendent qu'une structure provinciale est devenue inefficace dans le contexte de mondialisation des marchés et de la réglementation financière.

Inconfort

À la haute direction des banques Nationale et Laurentienne, hier, on réagissait avec un inconfort évident à l'énoncé déposé en Cour suprême par l'Association des banquiers.

«Nous prenons connaissance du document de l'Association. Mais nous prévoyons faire valoir notre point de vue au sujet de la commission unique au cours des prochains jours», a indiqué Claude Breton, directeur des communications au bureau du président de la Banque Nationale, Louis Vachon.

À l'instar de ses principaux homologues, M. Vachon était à Toronto hier pour participer à une conférence des présidents de banques avec des analystes boursiers et des gestionnaires de portefeuilles.

À la Banque Laurentienne, on a commenté la déposition de l'Association des banquiers en Cour suprême en soutenant qu'il ne s'agissait pas d'une «position officielle de la banque» au sujet du projet fédéral de commission unique.

«C'est vrai que l'Association représente les banquiers, dont nous. Mais, au sujet de la commission unique, nous n'avons pas de prise de position publique pour ou contre. Nous irons selon la décision des pouvoirs publics» a indiqué Gladys Caron, vice-présidente aux affaires publiques de la Banque Laurentienne.

Au cabinet du ministre québécois des Finances, Raymond Bachand, après s'être dit «déçu mais pas surpris» par l'énoncé de l'Association des banquiers, on s'interrogeait sur l'opinion des banques Nationale et Laurentienne envers une commission unique.

«Nous n'avons pas idée des positions qu'ont défendues ces deux banques au sein de leur association. Toutefois, nous avons remarqué qu'elles n'ont pris aucune position publiquement à ce jour dans ce dossier», a indiqué Catherine Poulin, attachée de presse du ministre Raymond Bachand.

Une question embarrassante

Soit dit en passant, le ministre Bachand et le président de la Banque Nationale, Louis Vachon, s'étaient retrouvés récemment et publiquement en situation d'inconfort au sujet du projet fédéral de commission unique.

C'était au moment du lancement de l'organisme Finance Montréal le 29 novembre dernier, où Louis Vachon agissait à titre de porte-parole des nombreux dirigeants de la finance québécoise présents à l'événement.

À une question d'un journaliste sur le projet fédéral de commission unique, M. Vachon, manifestement mal à l'aise, avait esquivé une prise de position publique en faisant allusion à «une annonce d'ici quelques mois».

«Il ne faut pas confondre notre silence à de l'inaction dans ce dossier», avait lancé M. Vachon de la table officielle, sous le regard attentif du ministre Bachand.