Huit grandes banques internationales, dont le Credit Agricole, se retrouvent sur la sellette aux Etats-Unis au sujet de leurs agissements pendant la crise, alors que les débats au Congrès sur la réforme financière s'intensifient.

Les informations se multiplient sur des enquêtes lancées tous azimuts par les autorités américaines, un mois après l'annonce d'une plainte du gendarme américain de la Bourse, la SEC, sur Goldman Sachs et l'un de ses traders, le français Fabrice Tourre.

La SEC les accuse d'avoir trompé des clients de la banque d'affaires en leur vendant des CDO, produits dérivés adossés à des prêts immobiliers à risque, les fameux «subprime» à l'origine de la crise financière.

Cette enquête concerne d'autres banques, dont l'américaine Citigroup, qui a indiqué récemment répondre à des «demandes de documents et d'informations de la SEC et d'autres agences gouvernementales» en relation avec les subprimes. D'après la chaîne Fox Business News, l'allemande Deutsche Bank est également concernée.

Selon le Wall Street Journal de jeudi, la justice américaine enquête également sur la façon dont les banques ont vendu des produits liés aux subprimes, en particulier les américaines Goldman Sachs, Morgan Stanley et Citigroup, ainsi que Deutsche Bank et la suisse UBS.

Parallèlement, le ministre de la Justice de New York, Andrew Cuomo, enquête sur la possibilité que les grandes banques aient fourni des informations trompeuses aux agences de notation qui évaluaient les CDO.

D'après le New York Times de jeudi, huit grandes banques sont visées: Goldman Sachs, Morgan Stanley, Citigroup, Merrill Lynch (rachetée fin 2008 par Bank of America), Credit Agricole, Deutsche Bank, UBS et Credit Suisse.

Un porte-parole de Bank of America a confirmé à l'AFP que sa banque avait reçu mercredi une notification des services d'Andrew Cuomo. «Nous coopérons avec le ministre de la Justice de New York», a-t-il ajouté.

Deutsche Bank a également confirmé à l'AFP être visée par l'enquête, tout en clamant son innocence. Les autres banques ont décliné tout commentaire.

Reste à voir si les enquêtes en cours vont se transformer en poursuites véritables.

«Toute action judiciaire contre une banque est grave mais on en n'est qu'au stade préliminaire», remarque Gregori Volokhine, stratège boursier de Meeschaert New York, interrogé par l'AFP.

Jusqu'à présent, «les banques sont parvenues à des accords à l'amiable» sans aller jusqu'aux procès, note-t-il.

Pour lui, l'enquête ouverte par le ministre de la Justice de New York est surtout négative pour les agences de notation. «On pouvait avoir déjà beaucoup de doutes sur leur objectivité», et ces nouvelles informations portent encore un coup à la crédibilité de leurs notations.

Les analystes de Credit Suisse relativisent aussi dans une note l'enquête de la Justice américaine sur les ventes de CDO: «s'il y en a une, elle reste au stade très préliminaire», soulignent-ils dans une note.

Une enquête ouverte ne débouche pas systématiquement sur l'ouverture de poursuites, notamment dans des affaires financières telles que celle des ventes de subprime. Il est difficile de prouver que les banques, qui ont toutes essuyé de fortes pertes pendant la crise et dans la foulée de l'effondrement du marché immobilier américain, ont sciemment trompé leurs clients.

Les analystes de Credit Suisse reconnaissent toutefois qu'«à court terme cette mauvaise presse pose un risque et que la perspective d'une régulation» accrue reste une menace.

Les révélations sur ces enquêtes arrivent en effet à point nommé pour l'administration américaine, qui essaie de faire adopter par le Congrès une réforme de la réglementation financière, devenue sa priorité législative numéro un, et qui entend notamment proposer un meilleur contrôle de l'immense marché des dérivés jusqu'à présent très opaque.