Trois mois après son arrestation pour une escroquerie portant sur quelque 50 milliards de dollars, Bernard Madoff a annoncé mardi qu'il allait plaider coupable et le procureur, écartant toute clémence, qu'il allait requérir 150 ans de prison à son encontre.

Au cours d'une audience consacrée à une question mineure mardi au tribunal fédéral de New York qui juge l'affaire au pénal, l'avocat de l'homme d'affaires, Ira Lee Sorkin, a tout à coup déclaré à la cour que son client plaidera coupable de 11 chefs d'inculpation jeudi, jour prévu pour sa traduction officielle en justice.

«Oui, votre honneur», a-t-il répondu au juge Denny Chin qui lui posait la question.

Cette procédure, dont il est question depuis des semaines, va permettre d'éviter un procès devant un jury, et le juge émettra directement sa sentence. «Mais cette sentence ne sera pas prononcée avant plusieurs mois», a précisé Denny Chin.

Le magistrat va également devoir décider jeudi si Bernard Madoff peut rester assigné à résidence dans son appartement ou doit être incarcéré jusqu'à l'énoncé de la sentence.

Écartant toute possibilité de négociation ou de clémence, le procureur a déclaré ensuite qu'il allait requérir 150 ans de détention à l'encontre de Bernard Madoff.

«Il n'y a aucun accord pour une réduction de peine», a dit le procureur au juge dans la salle de tribunal comble. Il a accusé Bernard Madoff d'avoir monté «un schéma visant à spolier des clients... en sollicitant des milliards de dollars sous de faux prétextes». La liste des diverses fraudes, violations de règlements et opérations de blanchiment peut valoir à l'accusé jusqu'à 150 ans de détention, que le ministère public va requérir, a-t-il annoncé.

Le procureur a démenti par là toute négociation avec Bernard Madoff. Cette éventualité était évoquée, certains commentateurs n'exluant pas que les enquêteurs essayent d'obtenir la plus grande collaboration possible de l'accusé en échange de la promesse d'un réquisitoire moins virulent.

D'apparence impassible, le financier de 70 ans, vêtu d'un costume gris, chemise blanche et cravate noire, comparaissait mardi pour une question concernant son avocat. L'audience a débuté à 15h, mais l'homme d'affaires était arrivé plusieurs heures auparavant. Il portait un gilet pare-balles sous son manteau, ont constaté les journalistes.

Dans une lettre à la cour datée du 3 mars, le procureur soulignait que les parents d'Ira Lee Sorkin, l'avocat de Bernard Madoff, avaient confié à l'escroc présumé environ 900 000 dollars. Ceci aurait pu constituer un conflit d'intérêt et le juge devait demander à l'accusé s'il souhaitait conserver le même avocat ou en changer.

La question de l'avocat n'a en fait occupé que la moitié du temps de l'audience, Bernard Madoff demandant à conserver Me Sorkin, et la cour est passée sans transition à la ligne de conduite que va adopter l'escroc présumé jeudi.

Depuis plusieurs jours, les enquêteurs indiquaient qu'il était sur le point de plaider coupable. Selon la procédure américaine, s'il annonce qu'il a décidé de «renoncer à l'inculpation», il n'y aura pas de procès devant un grand jury et le juge prononcera directement sa sentence.

Son avocat a déjà signé et approuvé un document allant en ce sens.

Pour l'audience de jeudi, le tribunal a enregistré 25 demandes d'intervention de victimes et le nombre pourrait augmenter avant la clôture des candidatures mercredi, a indiqué la cour.