On a accolé plusieurs formules-chocs à Jean-Martin Aussant : enfant chéri des souverainistes, gardien de l'orthodoxie et prochain rassembleur des forces indépendantistes. Mais la relation particulière qu'il avait développée avec l'ancien premier ministre fait qu'on le considère aussi comme l'hériter de Jacques Parizeau.

Héritier politique de M. Parizeau, c'est quelque chose que vous sentez ?

Honnêtement, je trouve que c'est gros à porter. À mon sens, M. Parizeau est le plus grand politicien qu'on a eu dans l'histoire du Québec. Dans la clarté et dans le désir de transmettre une confiance à un peuple entier, je pense qu'il n'y en a pas eu d'autres comme lui. C'est immense comme souliers à chausser.

Vous en sentez-vous capable ?

C'est une question piège [rires]. Si on répond non, on a l'air du gars pessimiste. Si on répond oui, on a l'air de la grosse tête. Capable ? En fait, ce qu'il a tenté de faire dans sa carrière, et ce qu'il a réussi à faire, ça m'inspire au plus haut point à essayer de faire la même chose. Il a même inspiré des fédéralistes à aller au bout de ce qu'ils peuvent contribuer à la société. Sur ce plan, je me sens intéressé et interpellé à suivre ce qu'il a fait. Capable de le remplacer ? Je pense qu'il est irremplaçable. Mais on peut suivre ses traces.

Comment expliquer votre rapprochement ?

Ce qui nous a connectés, c'est le fait que je sois économiste et que j'aie une grande admiration pour l'Angleterre, même si j'étais dans un parti souverainiste. Pour bien des gens, c'est une contradiction, mais pas pour moi. Je pense qu'on peut être décomplexé complètement par rapport à ce qu'on appelait « l'empire », et quand même admirer ce qu'ils ont réussi à faire chez eux. Avec M. Parizeau, il y avait des affinités dès le départ qui ont fait qu'on s'entendait bien. Par la suite, on s'est rapprochés assez rapidement.

Lors de l'hommage à M. Parizeau, vous avez dit qu'il était ambidextre, un homme de chiffres qui a du coeur. Ça vous ressemble aussi ?

Je pense que ça me définit assez [rires]. Dans ce que j'ai fait en finance, il y avait une finalité sociale.

Qu'est-ce que M. Parizeau vous a appris ?

Il m'a appris que dans certaines circonstances, il peut y avoir des vertus à la patience. Ce qui n'est pas une de mes forces naturelles. M. Parizeau était aussi un homme qui analysait tout. Son cerveau me fascinait, en fait. Quand on discutait avec lui, on avait l'impression d'apprendre même dans ses silences parce qu'on avait le temps de digérer ce qu'il venait de dire. Et quand il repartait, on était au même point que lui. Cette capacité de réflexion là, d'être patient et de bien préparer les choses, c'est ce que je retiens de lui.