Après une année de tourmente éthique, Dessau vient d'être vendue à la firme de génie albertaine Stantec. La transaction a été conclue hier et Stantec l'a confirmée par voie de communiqué, ce matin, peu après la publication de la nouvelle par La Presse. Le montant de la transaction n'a pas été dévoilé.

Dessau qui avait célébré ses 50 ans d'existence en 2007 en compagnie du monde politique québécois, soulignant à quel point sa réussite commerciale était intimement liée à la Révolution tranquille, vient de changer de port d'attache. «Dessau reste au Canada, mais ce n'est plus une société québécoise», a laissé tomber, hier, une source concernée par la vente et ayant requis l'anonymat.

Selon cette personne, le changement de main était devenu inévitable. «C'était une question de survie. Il fallait sauver les jobs et les investissements», a-t-elle indiqué avant d'ajouter: le fait que Stantec soit un petit acteur au Québec rassure le personnel puisque la firme aura besoin des équipes en place.

À l'échelle canadienne, Stantec domine le marché du génie avec SNC-Lavalin. Elle est cotée en bourse. Elle bénéficie d'une «capitalisation solide», ce qui pourrait signifier qu'elle pourrait acheter Dessau sans obtenir de financement, a expliqué cette même source.

Une autre personne bien au fait du dossier, qui ne souhaitait pas être identifiée, a raconté que les derniers fils de la transaction ont été attachés lors d'une assemblée qui s'est déroulée hier au siège social de Dessau, au centre-ville de Montréal. La haute direction de Stantec était dans les bureaux depuis la veille, a indiqué une troisième personne. Les négociations entre les deux firmes auraient commencé au cours de l'été; rapidement, Stantec aurait déclassé les quelques adversaires sur la ligne de départ.

Selon le communiqué de Stantec, la transaction concerne seulement les activités d'ingénierie de Dessau, ce qui excluerait donc les filiales Verreault (construction) et Plania (urbanisme).

« Le Québec comprend près de 25 % de la population canadienne et un marché d'infrastructures important; cette expansion sera donc une opportunité de croissance pour nous à long terme », a déclaré M. Bob Gomes, PDG de Stantec.

« L'engagement inébranlable envers l'éthique et l'intégrité ainsi que la culture de Stantec correspondent parfaitement à nos valeurs, affirme pour sa part Isabelle Jodoin, Présidente-directrice générale de Dessau. Le regroupement de nos deux firmes et l'éventail des services de Stantec présentent des opportunités exceptionnelles pour nos employés, à la fois au Québec et dans les autres régions où la firme est présente. »

En mai dernier, une porte-parole de Dessau, Rébecka Fortin, avait laissé entendre que l'entreprise n'allait pas être vendue. Dessau venait alors de céder l'une de ses principales filiales, LVM, à un groupe comprenant le fonds ONCAP, propriété du conglomérat torontois Onex, et la Caisse de dépôt et placement du Québec.

«C'est une étape importante qu'on a franchie dans le processus de recapitalisation qui permet en fait de solutionner les enjeux de capital de Groupe Dessau», avait affirmé Mme Fortin. L'entreprise devait alors se renflouer dans la foulée du départ de ses deux plus importants actionnaires, Jean-Pierre et Rosaire Sauriol.

La porte-parole avait assuré que les sommes récoltées par Dessau à la suite de la vente de LVM n'aboutiraient pas dans les poches des frères Sauriol.

On ne sait pas encore si les Sauriol retrouveront la valeur des actions dont ils ont dû se départir en 2013. «La convention d'actionnaires prévoit qu'au moment d'un départ, il y a un mécanisme de rachat des actions qui s'enclenche sur une période assez longue», avait indiqué l'an dernier Isabelle Jodoin, PDG de Dessau Ingénierie, au journal Les Affaires. Entre-temps, Jean-Pierre et Rosaire Sauriol «deviennent comme des créanciers, si on veut», avait précisé Mme Jodoin.

Hier, une source a mentionné que les frères Sauriol pourraient devoir patienter encore avant de toucher quoi que ce soit.

Dessau comptait quelque 4800 employés en 2013. Mais lorsque le vice-président Rosaire Sauriol a été contraint de témoigner en mars 2013 à la commission Charbonneau, les choses ont basculé. M. Sauriol a reconnu que l'entreprise avait participé à un système de collusion qui permettait notamment de gonfler les prix. Trois mois plus tard, la firme se voyait interdire l'accès au marché des contrats publics. Dès lors, les pertes d'emplois se sont multipliées chez Dessau.

Pour tenter de se sortir de ce bourbier, la relève chez Dessau disait envisager le remboursement des sommes liées à la collusion. Alors vice-présidente principale et chef de l'exploitation chez Dessau, Isabelle Jodoin se disait prête à la discussion avec le gouvernement.

- Avec Sylvain Larocque

QUI EST STANTEC?

Fondée en 1954 à Edmonton, Stantec est la deuxième firme de génie canadienne, derrière SNC-Lavalin et devant WSP (ex-Genivar). Depuis 2000, elle a réalisé plus de 75 acquisitions, dont 7 cette année. En 2013, Stantec a enregistré des revenus de 1,8 milliard et des profits nets de 146 millions. L'entreprise, qui emploie 14 000 personnes, a des bureaux aux États-Unis, au Royaume-Uni, dans les Antilles, au Moyen-Orient et en Inde.

QUI EST STANTEC?

Fondée en 1954 à Edmonton, Stantec est la deuxième firme de génie canadienne, derrière SNC-Lavalin et devant WSP (ex-Genivar). Depuis 2000, elle a réalisé plus de 75 acquisitions, dont 7 cette année. En 2013, Stantec a enregistré des revenus de 1,8 milliard et des profits nets de 146 millions. L'entreprise, qui emploie 14 000 personnes, a des bureaux aux États-Unis, au Royaume-Uni, dans les Antilles, au Moyen-Orient et en Inde.