L'entreprise de vélos en libre-service Bixi aura une seconde vie. Après des semaines de rebondissements, les parties se sont entendues pour vendre les actifs de Bixi à l'international au grand voyageur Bruno Rodi, a appris La Presse.

L'offre d'achat de M. Rodi, d'une valeur de 4 millions de dollars comptant, a été acceptée hier, en soirée. À moins de pépins de dernière minute, la transaction devrait être entérinée par le tribunal demain vendredi.

La transaction vise le volet international de Bixi, notamment le concept, les brevets, les logiciels et certains contrats. La transaction a été confirmée à La Presse par l'avocat négociateur Sarto Blouin, conseiller juridique de Bruno Rodi.

Dans les prochains jours, les quelque 60 employés de Bixi seront officiellement mis à pied, selon nos informations. Environ 22 d'entre eux seront transférés à Bixi-Montréal, l'organisme créé par la Ville de Montréal pour poursuivre le concept à Montréal.

Pour les autres, une bonne partie sera réembauchée par l'organisation de M. Rodi qui pourrait s'appeler Bixi-International - mais il a été impossible de savoir précisément combien.

Bruno Rodi est cet entrepreneur de 59 ans qui a été désigné plus grand voyageur du Québec par La Presse, à la mi-mars. Ce Marco Polo des temps modernes a visité plus de 200 pays et territoires. Parmi ses exploits, il a notamment pédalé le Tour de France, atteint le pôle Nord et le pôle Sud en skis et traversé les plus grands déserts. Il était d'ailleurs en voyage durant les négociations.

L'homme a fait fortune dans l'immobilier, mais est surtout connu comme manufacturier et distributeur de meubles. Son entreprise « Rodi, Le spécialiste du sofa» est en affaires depuis 35 ans. Ses produits sont distribués dans plusieurs magasins au Québec et au Nouveau-Brunswick, mais également par l'entremise de ses deux bannières Rodi, à Longueuil et à Laval.

L'organisation de Bruno Rodi acquerra l'essentiel des actifs de la Société de vélo en libre-service (SVLS) dont la marque de commerce est Bixi - mais délaissera toutes les dettes et le passif de l'organisation en difficulté, ce qui comprend les poursuites.

SVLS, rappelons-le, s'est placé sous la protection de la Loi sur la faillite le 20 janvier, après que la Ville de Montréal ait manifesté son intention de saisir les actifs de l'entreprise. Depuis, la Ville a indiqué qu'elle poursuivrait l'exploitation du service à Montréal pendant au moins une autre saison (Bixi-Montréal), laissant au syndic de faillite le soin de trouver un acheteur pour le volet international.

SVLS avait vendu le concept à 22 grandes villes dans le monde (New-York, Chicago, Londres, etc.), mais n'a pas réussi à en rentabiliser l'exploitation, malgré un volume d'affaires de 63 millions l'an dernier.

Globalement, SVLS doit 46,1 millions à ses créanciers, dont 31,3 millions à la Ville de Montréal et 5,3 millions à la Banque Nationale, une créance garantie par la Ville.

La Ville récupérera la totalité des fruits de la vente (4 millions), puisqu'elle avait pris tous les biens de Bixi en garantie en échange de son prêt. Les 136 autres créanciers, tous ordinaires, ne toucheront donc aucun dividende. SVLS leur doit 9,5 millions et elle déclarera officiellement faillite après le transfert des actifs à l'organisation de Bruno Rodi, d'une part, et au nouvel exploitant pour les activités locales (Bixi-Montréal). 

Essentiellement, les difficultés qui ont poussé Bixi à la faillite s'explique par la non-rentabilité du réseau local, par la faible rentabilité des activités internationales et par les problèmes de logiciels.

La nouvelle sera donc difficile à digérer pour les créanciers, notamment le fabricant de vélos Cycles Devinci et le concepteur de logiciels 8D Technologies, dont les créances s'élèvent respectivement à 844 000$ et 565 000$. Toutefois, la relance devrait permettre à Devinci de continuer à vendre ses vélos réputés solides au nouvel exploitant, qui a l'intention d'intéresser d'autres villes par le concept.

Dans le cadre de la transaction, la plupart des contrats, notamment avec les grandes villes, seront résiliés. Dès que la transaction sera officialisée, Bruno Rodi et son équipe devront donc renégocier les contrats avec les villes qui offrent encore le service ou avec l'exploitant américain Alta Bicycle Share de même qu'avec certains fournisseurs.

L'organisation devra les rassurer sur son intention de restaurer la plate-forme de logiciels qui sert à assurer le service, qui a connu plusieurs bogues.

Le chef de la restructuration de SVLS, Dominic Deveaux, a confirmé qu'une offre avait été acceptée, mais n'a pas voulu confirmer l'identité de l'acheteur par respect pour le processus devant la cour.

PHOTO Marco Campanozzi, Archives La Presse

Bruno Rodi