La Régie de l'énergie a réduit l'appétit tarifaire d'Hydro-Québec, mais elle a fait la sourde oreille aux demandes répétées d'une catégorie de consommateurs d'électricité : les propriétaires, qui ne veulent plus être responsables des factures impayées de leurs locataires.

Déçue, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec ne lâchera pas le morceau. «Il y a d'autres tribunaux», a indiqué hier le porte-parole de la Corpiq, Hans Brouillette.

Les propriétaires québécois jugent aberrante l'obligation qui leur est faite d'assumer la facture d'électricité de leurs logements entre deux locataires ou quand l'un d'eux part sans prévenir Hydro-Québec.

«C'est une aberration», estime Hans Brouillette, qui souligne que ni Gaz Métro, ni Bell, ni Videotron n'imposent ce fardeau aux propriétaires de logements.

Une fois avisé, un propriétaire peut refuser la facture, mais Hydro coupe alors le service et le logement doit être rebranché pour le locataire suivant, aux frais du propriétaire. «C'est 300 $ que ça coûte, un rebranchement», précise le porte-parole.

S'ils décident de ne pas faire couper le service, les propriétaires doivent continuer d'assumer la redevance d'abonnement, même si le logement est vide et qu'il n'y a aucune consommation d'électricité. Plus de la moitié des propriétaires du Québec ont déjà goûté à cette médecine, selon la Corpiq. Même si la somme en jeu est très variable et pas toujours énorme, ils trouvent injuste d'avoir à payer à la place du fournisseur du service.

«C'est souvent entre 25 $ et 30$, mais la somme n'est pas importante. C'est une question de principe», soutient le porte-parole des propriétaires. Il estime que la Régie place les conditions de services d'électricité «en contradiction avec le Code civil du Québec, ce qui est une erreur de droit», qui doit être corrigée par un autre tribunal.

La Régie a jugé «équitable et conforme au droit le fait que le propriétaire soit l'ultime responsable de la consommation pour un logement sans titulaire d'abonnement ou un local laissé vacant, puisqu'il peut utiliser ou bénéficier du service d'électricité dans sa propriété».

Mauvais payeurs

Hydro-Québec ne sera donc pas obligée de courir après les locataires disparus sans prévenir pour se faire payer. Mais la société d'État ne pourra pas transmettre des informations sur les habitudes de paiements de ses clients à des agences de crédit dans le but de réduire ses mauvaises créances, comme elle le réclamait.

Hydro avait plaidé qu'étant donné qu'elle se fait payer après avoir fourni l'électricité et qu'elle ne peut interrompre le service en hiver, les mauvaises créances lui coûtent de plus en plus cher. Entre 2009 et 2011, le coût des mauvaises créances est passé de 72 à 91 millions, une hausse de 26%, a expliqué la société d'État devant la Régie.

Les représentants des consommateurs ont unanimement contesté cette requête d'Hydro. Dans une des preuves qu'ils ont soumises à la Régie, ils ont établi que l'impact de la divulgation des dossiers de crédit n'aurait qu'un impact marginal sur les mauvaises créances.

La Régie leur a donné raison. «L'efficacité à long terme de la mesure (...) est incertaine. De plus, les impacts négatifs apparaissent plus importants que les gains anticipés», ont tranché les régisseurs.

Des chiffres:

> 277 000 propriétaires de logements au Québec

> 15 000 membres à la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec

> 1,3 million nombre de ménages locataires