Personne ne pleure le départ du maire Gérald Tremblay parmi les gens d'affaires que La Presse Affaires a joints hier. Montréal est sclérosé, déplore notamment le sondeur Jean-Marc Léger. La priorité de l'administration municipale devrait aller à l'amélioration de l'environnement d'affaires de la métropole, selon lui.

«Le sentiment est très morose à Montréal. Qu'il y ait un changement de garde, c'est très bien vu, dit le président du Groupe Léger Marketing, qui est en contact avec plusieurs membres du milieu des affaires en sa qualité de vice-président de la chambre de commerce de Montréal métropolitain. Dans un sondage qu'on a fait dernièrement, 94% des gens d'affaires disent que l'environnement d'affaires ne s'était pas amélioré depuis 5 ans à Montréal. Alors qu'à Québec, tout est possible; à Montréal, rien n'est possible.»

Ces propos trouvent écho chez Simon Prévost, président du regroupement des Manufacturiers et exportateurs du Québec.

«Le premier dossier, c'est l'accès à la ville, c'est fondamental. Actuellement, de la façon dont c'est organisé, il y a beaucoup de perte de productivité. Il y a des entreprises qui quittent Montréal au lieu de venir s'y installer», fait-il remarquer. Un exode qu'il évalue à environ 1% des établissements, par an. Le taux de chômage y est aussi plus élevé que dans la province.

«Un des rôles du prochain maire, dit Robert Gagné, économiste et directeur du Centre sur la productivité de HEC Montréal, c'est d'assurer la mobilité des personnes et des marchandises dans sa ville pour que les entreprises et les individus prospèrent.»

Pour y arriver, la Ville doit se donner les moyens de livrer les meilleurs services au moindre coût en s'appuyant sur des principes de concurrence. «Moins on est nombreux, plus c'est facile de s'entendre et de faire de la collusion», souligne M. Gagné.

La succession

Mais qui les gens d'affaires montréalais voient-ils à la tête de leur ville?

«Franchement, quand je lis La Presse le matin, entre la démission du maire et l'assassinat d'un mafieux, ça fait un peu Gotham City. Mais que fait Batman?», se demande Nathalie Francisci, chef du développement corporatif chez Jobwings, premier éditeur national de sites internet d'emplois spécialisés.

À défaut de trouver un Bruce Wayne montréalais, la spécialiste du recrutement souhaite voir une personnalité forte, solide, un leader courageux capable de s'attaquer au statu quo. Un genre de Lucien Bouchard, à l'époque de la fondation du Bloc québécois au début des années 90, donne-t-elle en exemple. Elle cite aussi le maire actuel de New York, Michael Bloomberg.

Pour Jean-Marc Léger, deux qualités s'imposent: être au-dessus de tout soupçon et être un excellent gestionnaire. «Vous avez un fonceur que les citoyens souhaitent comme Denis Coderre. Dans nos sondages, les gens estiment que, lui, il pourrait faire le ménage, mais il a besoin d'un gars fort en gestion et en finance comme numéro deux».

Le prochain maire doit voir grand pour sa ville, soutient Stephen Leopold, un vétéran de l'immobilier commercial à qui on a souvent prêté l'intention de vouloir se présenter à la mairie, ce qu'il a encore nié hier. Le maire doit avoir aussi le souci de livrer de bons services aux citoyens, à commencer par le déneigement des trottoirs.

«Les gens veulent une nouvelle image pour Montréal», dit le président de Leopold Montréal Immobilier, et fondateur ainsi que président d'Audacité Montréal, qui fait campagne pour que le nouveau pont Champlain devienne la nouvelle signature emblématique de la ville.

Le courtier qui a longtemps pratiqué sa profession à New York rêve d'un Rudolph Giuliani, l'ex-maire de la métropole américaine qui était en poste à l'époque du 11 septembre 2001. «Il a nettoyé New York», avance M. Leopold.

En attendant de dénicher la perle rare, Montréal doit toutefois éviter de retomber dans l'immobilisme, met en garde la chambre de commerce du Montréal métropolitain. «Nous avons besoin d'une transition tranquille, comme disait M. Bergeron (le chef de Projet Montréal). Tous les projets d'infrastructures enclenchés doivent continuer parce qu'ils sont nécessaires», dit Michel Leblanc, président et chef de la direction.