L'arrondissement qui englobe le centre-ville de Montréal veut inciter les propriétaires de terrains vagues et de stationnements à ciel ouvert à bâtir. Il entreprend une révision de son plan d'urbanisme, qui pourrait bientôt permettre la construction d'immeubles résidentiels plus hauts autour du quartier des affaires.

Le plan d'urbanisme, qui régit la construction dans le secteur, a 20 ans. Et il faut le mettre à jour pour refléter le marché immobilier d'aujourd'hui, affirme Bruno Collin, urbaniste à l'arrondissement de Ville-Marie. À l'époque, la Ville avait imaginé un centre-ville essentiellement constitué d'immeubles de bureaux. Or, depuis quelques années, de plus en plus de promoteurs souhaitent y ériger des immeubles résidentiels.

«Sur beaucoup de terrains vacants qui pourraient se prêter à de la construction résidentielle, il n'y a pas de projet parce que ce n'est pas intéressant pour les promoteurs, indique M. Collin. Ces promoteurs ont acquis ces terrains dans un objectif de construction d'une certaine densité et le zonage ne permet de rentabiliser leur investissement que s'ils bâtissent un immeuble commercial.»

L'arrondissement recense une trentaine de ces terrains, généralement des stationnements à ciel ouvert en périphérie du quartier des affaires.

Un bâtiment résidentiel est généralement plus étroit qu'un immeuble commercial, car la plupart des pièces qui s'y trouvent doivent avoir accès à des fenêtres. Pour rentabiliser sa construction, il faut donc le construire plus haut. S'il est adopté tel quel, le nouveau plan permettra aux promoteurs de bâtir des immeubles résidentiels de 5 à 20 mètres plus haut, soit d'un à quatre étages, dans certains secteurs du centre-ville.

La version révisée du plan d'urbanisme sera soumise à une consultation publique à l'automne et elle entrerait en vigueur en 2013. Si elle est adoptée, l'arrondissement calcule que jusqu'à 13 500 logements pourraient voir le jour, répartis sur 750 000 mètres carrés si tous les terrains vacants sont exploités à leur plein potentiel.

Des prix exorbitants

«Certains terrains de stationnement sont présentement à vendre, même si leurs propriétaires ne l'affichent pas, souligne Mathieu Collette, consultant principal en immobilier au Groupe Altus. Mais les prix demandés sont souvent très élevés parce que c'est encore très payant de faire du stationnement extérieur au centre-ville de Montréal.»

Plusieurs de ces stationnements sont d'ailleurs exploités de manière illégale, souligne cet expert. Selon lui, si la Ville veut forcer leurs propriétaires à vendre ou à bâtir, elle devra aussi adopter des mesures punitives plus sévères.

Chose certaine, toutefois, la révision du plan d'urbanisme va inciter des promoteurs à allonger davantage pour mettre la main sur les terrains vagues du centre-ville.

«Ça fait une grande différence parce qu'on calcule la valeur des terrains en fonction de la superficie constructible, souligne le courtier Brett Miller, de l'agence immobilière CB Richard Ellis. Si vous augmentez cette superficie par 20%, il y a une corrélation directe avec l'évaluation du terrain, qui augmente à son tour de 20%.»

Cet observateur attentif du secteur immobilier estime que la révision du plan d'urbanisme est une «très bonne nouvelle» pour le marché immobilier montréalais. «Pas seulement pour les promoteurs et les gens d'affaires, précise-t-il, mais également pour les écologistes parce que ça va contribuer à éviter l'étalement urbain.»

Moins haut près de la montagne

Le nouveau plan propose par ailleurs une réduction des hauteurs et des densités près du Vieux-Montréal et au sud du mont Royal afin de préserver les vues. L'arrondissement souhaite également éviter un autre épisode comme celui de la maison Redpath. Cet immeuble patrimonial a été négligé par son propriétaire pendant des années avant que celui-ci ne propose de le raser pour y ériger un bâtiment en hauteur. L'arrondissement de Ville-Marie a finalement bloqué le projet.