Une entreprise névralgique en biotechnologie, Lab Recherche (T.LRI), vient d'être rescapée, sans tambour ni trompette. Le sauvetage a toutefois été douloureux pour des financiers de Québec inc., qui y perdent 44 millions de dollars.

Lab Recherche fait des tests précliniques sur les animaux pour le compte d'entreprises pharmaceutiques. Elle injecte les molécules prometteuses de ses clients dans le corps des rats, des porcs et des singes pour vérifier leur efficacité et les effets secondaires.

L'entreprise de près de 500 employés a connu des difficultés après avoir doublé la superficie de ses laboratoires à Laval, en 2008. Le 20 avril, le tribunal a autorisé le rachat des actifs de Lab Recherche par la société française Applied Biology Company (ABC), société mère du laboratoire CIT Safety&Health Research Company.

Fonds FTQ et Banque Nationale

La valeur de la transaction est demeurée confidentielle, mais les pertes des financiers qui avaient appuyé Lab Recherche sont connues.

Ainsi, le Fonds de solidarité FTQ essuie une perte de 22 millions, soit l'une des plus importantes de son histoire. Le Fonds avait contribué au capital de la firme depuis 2006.

Le deuxième perdant est la Banque Nationale, selon les documents déposés en cour. Même en étant le premier créancier garanti de Lab Recherche, la Banque engrange des pertes de 15,2 millions, puisque l'offre d'ABC est insuffisante pour rembourser la totalité du prêt de l'institution.

L'opération se solde aussi par des écritures à l'encre rouge de 7,9 millions pour Investissement Québec, bras financier du gouvernement. Pour les trois institutions financières, les pertes s'élèvent donc à 44 millions.

«Au Fonds FTQ, nos actionnaires reçoivent des crédits d'impôt parce que nous courons des risques. C'est malheureux, mais ce n'est pas anormal que nous fassions des pertes dans certains dossiers. Au moins, des emplois sont conservés à Laval», a expliqué Josée Lagacée, porte-parole du Fonds FTQ.

Grand groupe mondial

En plus des locaux de Laval, Lab Recherche avait des installations en Hongrie et au Danemark. La transaction fait de la nouvelle entreprise CIT-Lab l'un des cinq plus grands groupes mondiaux de recherches contractuelles précliniques. Le chiffre d'affaires annuel y avoisine les 70 millions d'euros (97 millions CAN) et quelque 800 employés travaillent dans les centres de recherche du Canada, de la France, du Danemark et de la Hongrie.

La déconfiture de Lab Recherche s'explique notamment par l'environnement d'affaires difficile. L'agrandissement des labos de Laval a été achevé en octobre 2008, en pleine crise financière. À cela s'ajoute la contraction du marché biopharmaceutique, provoqué par la fusion de géants du secteur, qui a frappé les sous-traitants comme Lab Recherche.

En février 2010, d'ailleurs, une autre entreprise de tests, MDS Pharma, a été frappée par cette conjoncture. Une fusion faisait alors perdre 225 emplois à Montréal, essentiellement concentrés dans les anciens locaux de Phoenix, dans l'arrondissement de Saint-Laurent.

Dans le cas de Lab Recherche, d'autres créanciers y perdent beaucoup. C'est le cas de Développement économique Canada (306 331$), de la firme d'avocats Fasken Martineau Dumoulin (302 514$), du Centre universitaire de santé McGill (120 000$), de CFC Canada (111 475$) et d'Anapharm (87 412$), notamment.

La Ville de Laval perd également 451 476$ en impôt foncier impayé et la Commission scolaire de Laval, 79 156$.

Globalement, la faillite de la coquille restante de Lab Recherche fait perdre 28,8 millions de dollars à l'ensemble des créanciers, dont 5,7 millions aux créanciers autres que la Banque Nationale et Investissement Québec.

Seuls 17 employés perdent toutefois leur emploi dans la restructuration, affirme le vice-président de Lab-CIT, Andrew Graham. Laval conserve 220 emplois, la Hongrie, 110, et le Danemark, 150. Le séquestre à la transaction est la firme Samson Bélair Deloitte & Touche, tandis que le conseiller financier est Synergis Capital.

«L'entreprise compte d'excellents actifs et employés. Nous sommes fiers d'avoir pu sauvegarder l'organisation malgré les pertes», a déclaré Stéphane Lebouyonnec, président de Synergis Capital.