Le milieu des affaires montréalais fulmine contre le budget présenté mercredi par l'administration Tremblay, malgré de nouvelles mesures pour le développement économique. Ses représentants estiment que la Ville doit faire le ménage dans l'appareil municipal au lieu d'imposer de nouvelles taxes aux entreprises.

Les gens d'affaires ne digèrent pas la hausse du fardeau fiscal de 4,3%, qui touchera autant les propriétaires commerciaux que résidentiels. Cette deuxième hausse de l'impôt foncier en autant d'années s'ajoute à la taxe sur le stationnement dans les quartiers centraux, à la multiplication des parcomètres, ainsi qu'au prélèvement de 45$ pour chaque véhicule immatriculé dans l'île.

Pendant qu'elle puise davantage dans les poches des commerçants, l'administration Tremblay ne prévoit aucune nouvelle mesure pour les aider, dénonce Claude Rainville, qui dirige l'Association des sociétés de développement commercial de Montréal. Selon lui, le budget 2011 nuit d'autant plus à ses membres qu'il risque d'inciter les résidants de Montréal à aller s'établir en banlieue.

«Les mesures qui sont prises par l'administration mettent une pression additionnelle énorme sur toutes les fonctions commerciales, déplore-t-il. Et, deuxièmement, l'austérité du budget va avoir un impact sur le niveau d'attractivité de Montréal.»

La chambre de commerce du Montréal métropolitain est elle aussi «déçue» du budget. Son président, Michel Leblanc, fait valoir que les dépenses de la Ville ont bondi de 5%, preuve que l'administration Tremblay doit redoubler d'efforts pour rendre l'appareil municipal plus efficace.

«On sent une impatience dans le milieu des affaires envers la Ville, qui procède à des investissements nécessaires, mais qui est incapable de procéder à la rationalisation et à l'amélioration de sa propre gouvernance», a-t-il affirmé.

La Ville se défend

L'administration Tremblay a fait ses devoirs, insiste le grand argentier de la Ville, Alan DeSousa. N'eût été l'obligation de renflouer les caisses de retraite déficitaires, souligne-t-il, les dépenses n'auraient augmenté que de 1,8%.

Le responsable des finances au comité exécutif fait valoir que, pas plus tard que l'été dernier, la Ville a imposé des compressions de 1% aux arrondissements et gelé les budgets de plusieurs services. Elle a adopté une série de mesures pour resserrer les règles dans l'octroi des contrats municipaux, et vient de lancer une cure minceur qui lui permettra d'économiser 250 millions en deux ans. «Si le milieu des affaires regarde attentivement ce que nous avons établi, a-t-il indiqué, je pense qu'il va reconnaître que nous avons été très prudents, très conservateurs, et que les entreprises vont beaucoup profiter de nos décisions.»

Son collègue responsable du développement économique, Richard Deschamps, se dit sensible aux craintes des commerçants, mais assure que les données économiques restent favorables. La métropole a retrouvé le niveau d'emploi d'avant la récession, souligne-t-il. Des projets comme le CHUM et le Quartier des spectacles battent leur plein, et la vigueur du marché immobilier démontre que Montréal reste une ville attrayante.

«Il va falloir commencer à arrêter de colporter les inquiétudes et les possibles états d'âme, a-t-il affirmé. Il va falloir aussi regarder les faits. Montréal n'est pas nécessairement en péril.»

Le budget prévoit d'ailleurs diverses mesures d'aide aux commerces et aux industries. La Ville a notamment reconduit le programme PRAM pour le commerce, et doublé l'enveloppe de celui pour les industries. Ces sommes permettront de subventionner les propriétaires qui rénovent leurs établissements commerciaux ou industriels en leur accordant une réduction d'impôt foncier.

Cette mesure, fort populaire auprès des entreprises, a été saluée par le milieu des affaires, hier. Mais, selon Raymond Bouchard, président de l'Institut de développement urbain, la Ville donnerait un bien meilleur coup de pouce à l'économie en réduisant l'impôt foncier, ou en larguant la taxe sur les stationnements au centre-ville qui sera imposée pour la deuxième année.

«Il y a une limite jusqu'où on va accepter que l'impôt foncier augmente, a-t-il indiqué. Il commence à y avoir une grande impatience.»