Le ministre de l'Agriculture, Claude Béchard, a tranché: la mesure d'efficacité tant décriée par les agriculteurs sera bel et bien incluse dans le programme d'assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA).

Mais le feuilleton politico-agricole n'est pas terminé pour autant. Insatisfaite des mesures de transition censées répondre à ses préoccupations, selon les mots de la Financière agricole, l'Union des producteurs agricoles (UPA) demande une rencontre «à très brève échéance» avec le premier ministre Jean Charest.La Financière agricole et l'UPA s'opposent depuis le mois de mars sur une mesure incluse dans le plan de compressions de l'ASRA. Cette mesure d'efficacité, en axant le calcul des coûts de production sur les fermes les plus productives, diminuera les compensations de l'ensemble des bénéficiaires.

La Financière agricole estime que cette mesure est essentielle pour respecter le nouveau cadre financier (comprenant un plafond des compensations de 756 millions de dollars) qui doit assurer la pérennité du programme ASRA. L'UPA estime pour sa part qu'elle n'est pas nécessaire et qu'elle poussera à la faillite plusieurs producteurs en difficulté.

La Financière a annoncé mercredi que la mesure d'efficacité sera introduite progressivement dans les secteurs des veaux d'embouche et des agneaux. L'organisme s'engage aussi à consacrer sa nouvelle enveloppe budgétaire et tout surplus aux programmes et à leur fonctionnement. Elle fera un bilan financier en 2013, après quoi différents ajustements «pourraient être envisagés».

L'UPA estime que ces mesures de transition sont «floues, inéquitables et insuffisantes pour éviter une catastrophe en devenir».

Proposition refusée

Pour convaincre la Financière de laisser tomber la mesure d'efficacité, l'UPA avait proposé une clause anti-déficit qui lui ferait assumer les risques d'un éventuel dépassement du plafond des compensations de 759 millions. Par exemple, si le calcul des compensations totales dépassait le plafond de 20 millions, les différentes fédérations amputeraient au prorata le total de leurs compensations respectives.

L'UPA se dit à peu près certaine que cette clause n'aurait pas eu à être appliquée, parce que les mesures de resserrement de l'ASRA (outre la mesure d'efficacité) suffisent pour respecter le plafond.

Visiblement, la Financière agricole n'est pas de cet avis. Le ministre Béchard a confirmé mercredi qu'il appuyait la Financière. Il avait d'ailleurs donné une idée de sa réflexion dans une entrevue à La Presse Canadienne, en fin de semaine dernière.

«La question est de savoir si on met les freins avant, pour éviter d'arriver à ces 630 millions (NDLR: le budget d'exploitation maximal de la Financière), ou si on ne met pas de frein, et quand on arrivera, on frappera le mur. (...) Je n'ai aucune marge de manoeuvre. J'aime mieux prévenir que guérir.»

L'ASRA indemnisera les agriculteurs quand les prix du marché ne comblent pas les coûts de production. Le programme est financé au tiers par les primes des agriculteurs, et aux deux tiers par la Financière. Il a été si utile et utilisé dans les dernières années que la Financière agricole a dû emprunter massivement pour le financer, si bien que son déficit d'exploitation a atteint 650 millions. C'est ce qui est à l'origine de la réforme actuelle.